mort subite, ils n’ont pas discontinué de manger.
Le sang qu’on tire aux bêtes malades se fige facilement, & se couvre bientôt d’une couenne épaisse, dure, de couleur blanchâtre, tirant un peu sur le jaune. Les saignées mal-placées & au hasard, ont toujours eu des suites funestes. Quelques-unes faites à propos ont été salutaires, & leurs bons effets sensibles. La plupart des breuvages employés jusqu’à présent ont paru accélérer la mort, selon le rapport des personnes qui en ont le plus donné.
Il seroit à souhaiter qu’on pût découvrir la cause qui a produit l’épidémie ; mais ce seroit perdre un temps précieux que de s’attacher à en faire la perquisition, puisqu’il a toujours paru comme impossible de découvrir la source de toutes les maladies épidémiques ; ce n’est que par l’heureux effet du hasard, qu’on en a découvert quelques-unes, plutôt que par le travail des recherches pénibles & de la méditation. Il semble qu’on devroit attribuer le fléau, dont je sais le détail, à la grande humidité de l’air, trop long-temps continuée par les pluies &i les brouillards, qui n’ont cessé toute cette année de troubler la végétation & la fructification des plantes. Ajoutez à cela, que la terre trop profondément humectée par une surabondance d’eau, a pu répandre dans l’atmosphère des vapeurs malignes, qui auront aussi affecté extraordinairement toute l’économie animale ; quelqu’apparente que soit cette idée, je ne m’y attacherai point.
Pour développer méthodiquement ces maladies, on doit les considérer dans trois périodes : le commencement ou l’invasion, le fort ou l’état, le déclin ou la fin. Jusqu’à présent je crois n’avoir décrit que les deux derniers temps, c’est-à-dire l’état & le déclin : je pense qu’il est évident, par le narré des symptômes, que la maladie des bestiaux est dans son fort, lorsqu’elle fait connoître dans leur corps un caractère d’inertie des solides & d’insigne dépravation des humeurs. De la destruction de ce vice dépend le déclin qui doit conduire à la guérison : l’invasion, temps le plus favorable à prévenir l’orage demeure comme inconnue par le défaut d’intelligence & de savoir des personnes habituées à manier les bestiaux sans craindre leurs cornes & leurs pieds. Cependant, lorsque le mal est porté à son plus haut degré, la nature est près de succomber, ou de remporter la victoire ; il faut donc, avant cela, qu’elle se soit mise en jeu, & qu’elle ait fait des efforts pour se débarrasser de ce qui la menace de sa ruine ; ce seroit donc alors qu’il faudroit lui donner les secours les plus utiles pour détourner & affoiblir les forces de son ennemi qui se dérobe aux yeux, mais qui ne se cacheroit point au tact d’un maréchal expert, qui s’approcheroit de ces animaux sans crainte. Dans nos campagnes nous manquons de tels artistes, nous pourrions les guider avec fruit & étendre leurs connoissances.
Au défaut des symptômes pour découvrir le premier temps de l’invasion de la maladie, il faut tâcher de le développer par analogie avec le corps humain. L’épidémie a une si grande ressemblance avec ce que nous appelons dans l’homme, fièvre putride, maligne, pourprée & pestilentielle, que je ne balance pas de lui donner les mêmes noms chez les ani-