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bloc de bois formé de plusieurs pièces assemblées sur le sep, qui est fort long, & dont le dessous, ou la partie qui repose sur la terre, est absolument plate. Ce bloc qui forme les deux versoirs de cette charrue, fait avec le sep un gros coin, armé à son bout antérieur d’une pointe de fer qui tient lieu de soc : on a la facilité de l’alonger à mesure qu’il s’use, en frappant sur un barreau qui est entre le sep & le bloc qui répond à cette pointe. L’âge qui ne diffère point de celle de l’araire, entre dans une mortoise pratiquée à l’extrémité postérieure du bloc, dans lequel on fait aussi entrer un long levier qui sert de manche.

Cette charrue a deux défauts essentiels qui doivent en faire proscrire l’usage.

1o. Elle fatigue considérablement le laboureur, parce que son effet en ouvrant la terre étant celui d’un coin, la partie postérieure du sep tend à s’élever & à sortir du sillon, à mesure que le tirage fait effort pour faire entrer la pointe du soc : le laboureur est donc obligé d’appuyer continuellement sur les manches, afin que le sep ne s’élève point trop pour sortir du sillon. Il est par conséquent très-difficile de gouverner cette charrue de manière à faire un labour uniforme & de tracer des raies bien droites.

2o. Cette charrue n’ayant point de coutres, son soc n’étant qu’une pointe de fer sans tranchant, elle doit nécessairement éprouver de grandes difficultés à pénétrer dans la terre, en raison des frottemens considérables que le sep éprouve : l’attelage doit avoir une peine infinie à tirer la charrue pour lui faire tracer des sillons à une profondeur convenable. Si le terrein qu’on veut cultiver est fort, pour peu qu’il soit sec, cette charrue aura beaucoup de peine à l’entamer, à moins d’une force considérable pour vaincre la résistance qu’elle éprouvera, ce qui exige un attelage fort nombreux : si ce terrein qu’on suppose être fort se trouve assez humecté & détrempé par la pluie, la charrue entrera d’abord aisément ; mais que de difficultés n’éprouvera pas le sep pour pénétrer dans une terre qui n’est pas assez ouverte par le soc ? Au lieu d’être divisée, la terre sera pétrie & le second sillon deviendra plus difficile à ouvrir que le premier, parce que la terre aura été battue sur les côtés.

Section III.

Description d’une charrue légère, inventée en 1754.

Cette charrue, dont le Journal Économique du mois d’Avril 1754 donne la description, n’offre qu’un instrument d’Agriculture capable d’exciter la curiosité à cause de sa nouveauté ; mais l’utilité qu’on auroit lieu d’en attendre est bien éloignée de répondre au zèle qu’on doit supposer à son Auteur.

Cette charrue consiste dans un soc emmanché comme le sont les pattes d’oyes du cultivateur de M. Châteauvieux, dont nous donnerons la description dans la suite de ce traité. Il a treize pouces de hauteur depuis la flèche à laquelle il est attaché jusqu’au fond du sillon. Sa figure est courbe, & son côté convexe se trouve en arrière ; il est terminé à peu près comme le tranchant d’une hache à la partie qui entre dans la terre. Son