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sitions royales ou ecclésiastiques, l’achat & l’intérêt de l’achat des bestiaux, des instrrumens aratoires, leur entretien, leur renouvellement &c. ; que l’on déduisît ces dépenses des produits enfin, que l’on comparât les produits nets avec ceux que donnent une coupe de bois ; à coup sur la balance pencheroit prodigieusement en faveur du dernier. Cette observation devroit toujours être présente à l’esprit d’un père de famille qui aime ses enfans. Voilà des dots toutes trouvées pour le mariage des filles.

Section III.

Des précautions à prendre après le Défrichement.

I. Des landes maigres. Je suis bien éloigné du sentiment de presque tous les écrivains sur l’agriculture, qui conseillent de semer aussitôt que l’on a défriché ; je pense que l’espace de quinze à dix-huit mois après, est à peine suffisant. Cette assertion paraîtra outrée à celui qui ne réfléchit pas : raisonnons donc pour lui.

De méchantes bruyères ont peine à végéter dans les landes maigres ; une herbe fluette & basse tapisse de part en part la surface, & le reste est recouvert par des lichens & autres plantes coriacées de cette famille. Si cette végétation est languissante, il y a donc un vice essentiel : or, croira-t-on avoir remédié ou détruit ce vice, en retournant la terre & la divisant même avec la charrue, en parties aussi atténuées que celle d’un jardin ? Cette division ne lui fournira pas les principes alimentaires de la végétation ; mais, tout au plus, elle la disposera à ses recevoir de l’air, des météores & de la décomposition des substances végétales, enfouies par la charrue. Cette addition de principes est l’effet du temps, & même un an après les premiers labours, les bruyères ne seront pas encore pourries : cependant c’est à leur décomposition que sera due uniquement la petite addition de l’humus. (Voyez le mot Amendement). Ainsi, en semant sur les premiers labours, la semence trouve une terre aride. Je veux même que la première récolte soit passable ; mais précisément cette récolte absorbera, par la végétation, le peu de terre végétale qui ressort, & la seconde sera de nulle valeur. Combien n’ai-je pas vu faire de défrichemens, & se hâter de semer aussitôt après, ou du grain ou du sarrasin, &c. ? J’ai vu aussi qu’il a fallu abandonner la culture de ces terres : L’expérience journalière prouve cette vérité.

Si j’avois à opérer sur de pareilles landes, & que j’eusse la manie de leur demander du grain, sans pouvoir leur multiplier les engrais, je commencerais, dans le printemps, à dérompre le terrein, avec une forte charrue, par quatre labours croisés : j’y sèmerois du grain quelconque, comme des vesce, des ers, des lupins, du sarrasin, &c. & lorsque ces plantes seroient dans leur plus forte végétation, c’est-à-dire, au moment où la fleur va épanouir, je les enterrerais avec la charrue. La même opération seroit répétée l’année suivante, &, à la troisième année, je sèmerois des grains pour les récolter. Voilà, me dira-t-on, bien du travail sans produit : j’en conviens ; mais j’assure celui des années suivantes. Ce n’est pas tout ; afin de