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crise complète tous les sept jours, & que tous les jours impairs, il se fait de petites crises pour préparer la grande, la crise du septième jour. Il est certain que l’observation démontre tous les jours la vérité de cette doctrine ; mais cette même observation prouve aussi que les crises viennent dans des jours différens de ceux qu’indiquent les anciens & leurs sectateurs.

Il est très-certain que les crises viennent les jours pairs des maladies, comme les jours impairs, le cinq comme le huit, & le dix comme le treize. Il est impossible de soumettre au calcul une opération de la nature, aussi voilée que celle-là. Comment peut-il tomber sous les sens que la crise, qui n’est autre chose qu’un changement favorable qui se fait dans le cours d’une maladie, par des loix qui nous sont entièrement inconnues, soit toujours invariablement fixée au même temps ? S’il est démontré clairement que les hommes diffèrent entr’eux, autant par les traits de la physionomie & par la diversité des tempéramens, que par les caractères, & si, de plus, on admet différens dégrés dans la maladie, toutes ces choses seront démontrées. Il faut à la nature d’autant plus de temps pour préparer les crises & pour les réunir, que la maladie est plus dangereuse, la différence des tempéramens ajoute encore des modifications dans la marche plus ou moins rapide que suit la nature dans le travail des crises.

Si le tempérament fournit des différences pour le temps des crises, dans les maladies, combien l’âge le sexe la manière de vivre, les passions & les maladies qui ont été précédé, ne fournissent-elles pas de nuances à la réflexion ?

Les preuves sur lesquelles nous avons appuyés nos raisonnemens pour combattre l’invariabilité des crises dans les maladies, à des jours marqués, nous paroissent d’autant plus lumineuses, qu’elles sont posées sur la base de l’expérience journalière. Cette méthode de la variabilité des crises, est non-seulement démontrée fausse par l’expérience, mais elle est encore sujette à donner naissance à des erreurs très-pernicieuses.

Il est prouvé, 1°. que tous les malades n’éprouvent pas des crises ; 2°. que lorsqu’ils en ont, toutes les crises ne sont pas parfaites : or, est-il raisonnable, de calculer un traitement méthodique & semblable pour ces malades ? Non sans doute, ce seroit le comble de l’entêtement & des préjugés : les soi-disans partisans & émules de la nature, dans l’attente d’une crise, s’occupent à regarder tranquillement la nature succomber sous le fardeau, sans lui prêter une main secourable ; & presque toutes les maladies aiguës, sont mortelles entre les mains de ces sages amateurs de la belle antiquité.

Peut-être de nos jours a-t-on donné dans un excès contraire, ou pour le moins aussi dangereux : on a prétendu que la nature, & ses crises étoient entièrement inutiles dans les maladies aiguës, & que le médecin devoit seul être l’agent actif. Cette nouvelle méthode est défectueuse ; jettons un coup d’œil sur les erreurs qu’elle entraîne avec elle, & tâchons de saisir la vraie marche de la nature.

La nature n’excite des crises que