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la nécessité de conserver & de ménager toutes les racines, & à cet effet, de ne pas planter l’arbre trop gros. Il n’en est pas tout-à-fait ainsi des branches à laisser sur la tige ; si on les coupoit ras du tronc, il faudroit que les bourgeons à naître, parsemés dans tout le tissu de l’écorce, la perçassent, pour produire de nouvelles branches ; mais si les racines ont été mutilées, si l’arbre a été planté à la fin de l’hiver, l’écorce ne contient plus cette humidité qui permettoit son extension & le développement du germe de ses bourgeons : il faut souvent attendre les effets de la sève du mois d’août, avant de les voir paroître. Dans les arbres plantés, ainsi que je l’ai prescrit, il est très-rare que ces bourgeons ne se développent au printemps ; mais sans chercher inutilement la formation des nouveaux bourgeons, pourquoi ne pas laisser sur cette tige toutes ses jeunes branches, & élaguer modérément celles qui sont trop bas : je dis modérément, parce que l’expérience m’a prouvé que ces jeunes branches sont autant de suçoirs ou de siphons qui attirent successivement la sève du bas vers le sommet, & facilitent son ascension ; enfin, elles maintiennent l’équilibre des fluides, entr’elles & les racines.

Si ces transplantations ont lieu pour la formation des forêts ou des bosquets, l’amputation des branches inférieures est inutile, puisque le bas de chaque arbre s’élaguera de lui-même, étant planté près à près, à mesure qu’il grandira : on doit également les ménager pour les arbres de bordure de bois, ou pour ceux des avenues. Relativement à ces derniers, il sera temps de les élaguer à la seconde année, afin que la tige talle & s’élève. Quant aux autres, ces branches inférieures intercepteront l’air & la lumière aux arbres de l’intérieur ; & afin d’en jouir, leur tige s’élancera au-dessus de celles de la circonférence ; & celles de la circonférence resteront toujours plus basses que celles de l’intérieur, parce que, n’étant pas gênées de ce côté, elles pousseront latéralement de fortes & de nombreuses branches, tandis que les autres seront forcées à s’élancer pour jouir du bénéfice de l’air, de la lumière, &c. Un seul coup-d’œil sur les arbres de l’intérieur, & sur ceux de la ceinture d’une forêt, prouve ce que j’avance. (Voyez ce que j’ai dit au mot Baliveau)

Si vous désirez que les chênes plantés en avenues ou en bosquets, ou en forêts, prospèrent, n’épargnez pas les labours pendant les premières années : c’est une dépense, il est vrai, mais vous en serez bien dédommagé par la forte végétation de vos arbres ; les plantes parasites leur font beaucoup de tort.

Si dans les chênes transplantés il s’en trouve quelques-uns à petites feuilles, ou de ceux qu’on reconnoît ne pas donner beaucoup de glands, on peut les greffer par approche, (Voyez le mot Greffe) avec une espèce à belle feuille ou à beaux fruits : on sent que cette opération suppose que les arbres ont été plantés près à près. Les autres manières de greffer réussissent rarement ; dans le cas de succès, on doit être attentif à émonder l’arbre au-dessous de la greffe, toutes les fois que le besoin le requiert.