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les impressions de l’air & de la chaleur ne sauroient pénétrer jusqu’à elles, & les bourgeons ne se formeront point, ou s’ils sont formés, leur force ne sera pas suffisante pour percer la terre, & ils périront avant d’arriver à sa surface. Si, au contraire, ces boutures sont trop extérieures, le hâle & une chaleur un peu vive les dessécheront bientôt. Il est donc nécessaire de consulter la nature du terrain, s’il est ombragé par d’autres arbres, ou s’il ne l’est pas ; enfin, si le sol retient constamment assez d’humidité pour que l’arbre puisse braver les chaleurs de l’été.

Si on arrache de terre quelques racines d’aune & qu’elles soient replantées, elles reprendront, pourvu qu’on y ait laissé la longueur d’un à deux pouces sans être enterrées.

On peut faire des pépinières en pratiquant l’une ou l’autre des méthodes indiquées, & tout possesseur d’un grand terrain humide doit en avoir une ; lorsque cet arbre a trois ans de pépinière, c’est le vrai tems de l’arracher.

L’année révolue après la plantation, on peut receper la tige pour former par la suite un taillis, ou bien abattre toutes les branches surnuméraires, à l’exception de la plus vigoureuse, si on est dans l’intention de former un arbre. L’emploi le plus précieux de cet arbre est pour les travaux souterrains. On perce le tronc de part en part sur sa longueur pour la conduite des eaux. Ces mêmes troncs coupés de mesure offrent le bois le plus utile à l’étayement des terres dans les galeries, dans les puits des mines : plus il y est humide, & mieux il s’y conserve. Les pilotis formés de ce bois sont excellens s’ils sont enfoncés au-dessous du niveau de l’eau ou de la terre.

L’aune taillé en cepée pousse vigoureusement, & après six ou huit ans, ses longues tiges sont dans le cas d’être abattues, & donnent de belles perches.

Dans les pays de vignobles, plantés en échalas, & qui manquent d’autre bois, cet arbre est d’une grande ressource ; il ne vaut cependant pas l’échalas de châtaignier, de chêne, ni même celui du saule marceau, & il est supérieur à ceux de peuplier & de saule. On s’en sert aussi pour cheviller & barrer les tonneaux.

Les tourneurs, les ébénistes, les sabotiers, recherchent les gros troncs. Les sabots faits avec le bois de hêtre sont préférables. Entre les mains de l’ébéniste, l’aune reçoit à merveille la couleur noire, & la conserve ; & il supplée à l’ébène.

Les pâtissiers, les boulangers, les verriers préfèrent l’aune à tout autre arbre pour chauffer le four.

M. Mallet, dans son Traité sur la culture des Asperges, conseille de faire infuser dans l’eau les feuilles de cet arbre, & de les y laisser macérer assez long-tems ; de se servir ensuite de cette eau pour arroser les asperges, afin de chasser les insectes qui les dévorent. Il établit cette opinion sur ce qu’il n’a jamais vu aucun insecte sur l’aune ; mais il est constant que tout le parenchyme des feuilles est souvent dévoré par les insectes, sans que l’épiderme qui le recouvre paroisse endommagé. La feuille ressemble alors à un réseau ; cet insecte est de la famille des insectes mineurs des feuilles. La seconde espèce de