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faut jamais perdre de vue que l’asperge croît dans les terrains sablonneux ; ainsi tous les soins du cultivateur doivent se borner à lui donner une terre légère, une terre végétale en abondance ; les débris des végétaux, des animaux bien consommés, sont donc ce qui lui convient le mieux.

De la manière de cueillir les asperges. D’une même racine il sort plusieurs tiges. On ne coupera que celles qui ont atteint leur grosseur & la hauteur convenable ; ces tiges seront coupées le plus près du tronc qu’il sera possible, & sans l’endommager.

L’auteur de l’École du Jardin potager, parle d’un outil pour couper les asperges, que je ne connois point. Il est fait en crochet par le bout, avec des dents taillantes, disposées comme celles d’une scie, accompagnées d’une longueur de fer de six pouces environ, de la grosseur d’une clef ordinaire, avec un manche de bois arrondi. On plonge cette espèce de couteau perpendiculairement le long de l’asperge ; & quand il est entré à six pouces environ, on donne un tour de main pour l’embrasser avec le bout du crochet, & on la coupe en tirant à soi. Le couteau ordinaire vaut tout autant.

Si on ne consomme pas les asperges sur le champ, on les lie en bottes, que l’on place dans un vase dont le fond est garni de deux pouces d’eau, ou bien on les enterre à la profondeur de trois à quatre pouces dans du sable frais : la végétation de l’asperge se continue encore & dans l’eau & dans le sable.

Pour avoir des asperges hors de leur saison ordinaire. Par-tout où l’argent est abondant, l’industrie augmente les moyens de le faire dépenser. L’homme riche croit multiplier ses jouissances lorsque sa table est couverte de mets chèrement payés. Son amour-propre est satisfait, & son goût ne sauroit l’être, parce qu’il a fallu contrarier la nature. Voici les méthodes factices, mises en usage pour se procurer le plus détestable de tous les légumes.

On le peut de deux manières, ou par le secours des couches chaudes, ou par celui des réchauts.

» La première méthode (c’est M. Decombes qui parle, & MM. de la Quintinie & Bradley avant lui) L’opération doit se prévoir de loin, c’est-à-dire, il faut se former un fond de plantes en pépinière de deux ans. Après cette époque, elles sont en état d’être transplantées sur couches. Ces couches doivent être fortes, larges de quatre pieds, & chargées de six pouces de terre & de terreau mêlés ensemble. Lorsqu’elles sont bien dressées, & que la plus grande chaleur est passée, on range les asperges sur la couche à six ou sept pouces de distance, & on les recouvre de deux pouces de terre mêlée ; on jette un peu de fumier chaud par-dessus, & on laisse quelques jours ces couches à l’air. »

» Quatre ou cinq jours après, on en retire exactement le fumier, & on les charge de nouveau de trois pouces de la même terre mêlée ; après quoi on les couvre, soit avec des cloches, soit avec des châssis, sur lesquels on jette de la litière sèche & des paillassons, pendant