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ches herbacées, auront eu le tems de se pourrir ; il restera tout au plus des débris, seulement des tiges ligneuses, qui n’auront pas eu le tems de se réduire en terreau.

Si on étoit moins pressé de jouir de son travail, & pour mieux en jouir par la suite, je dirois à celui qui défriche : laissez cette terre ouverte à larges & profonds sillons, pendant l’année révolue ; elle aura eu le tems de profiter du bénéfice de l’air, des pluies, des rosées. Une nouvelle herbe, peut-être même de jeunes bruyères y auront végété ; & voilà une nouvelle acquisition de terre végétale pour vos prochaines moissons : alors le second labour, donné à la même époque, enfouira ces herbes, & recroisera le premier travail. Au mot Défrichement, nous entrerons dans de plus grands détails. Ce n’est donc qu’à la seconde année que vous commencerez à multiplier les labours, afin de confier des grains à votre terre. J’ai conseillé à une personne de ma connoissance d’attendre la troisième, c’est-à-dire, de ne semer qu’à la fin de la seconde ; & les produits de deux portions du même champ, mis en comparaison, prouvèrent qu’il valloit mieux attendre.

On a beaucoup conseillé de porter sur les champs de cette nature, des vases d’étang, de marais, d’algue ; (Voyez ces mots) d’y charier des terres argileuses. Ces avis sont très-bons ; c’est-à-dire, qu’on crée un sol, mais on ne réfléchit point assez à la dépense énorme qu’entraîne une pareille opération ; & le cultivateur, écrasé par les impôts & par la misère, n’ose pas en avoir l’idée.

En Angleterre, où le gouvernement veille avec autant d’attention sur les progrès de l’agriculture que sur ceux du commerce, fit publier, en 1748, la manière de rendre les bruyères fertiles, par le moyen des turneps, ou turnips ; (voyez ce mot) & cette méthode fut également imprimée &c distribuée dans les états d’Hanovre. Voici comment le souverain s’explique & parle en père à ses sujets.

Sa majesté ayant ordonné qu’on prenne tous les soins imaginables pour tirer parti des bruyères qui se trouvent dans ses pays, & pour les rendre fertiles de la même façon qu’on le fait en Angleterre avec beaucoup de succès ; & le principal soin dépendant de ce que tous les employés dans les campagnes se donnent la peine de faire des essais en petit, pour tâcher de découvrir si, & comment les intentions de sa majesté pourront être effectuées, pour cultiver les districts considérables de bruyères qui se trouvent dans son pays : nous avons cru devoir vous communiquer, qu’en Angleterre, au défaut de fumier nécessaire, on sème dans des terres stériles & désertes, de la graine d’une certaine espèce de rave blanche, ou de navet appelé turnips ; & que par ce moyen on en tire si bon parti, qu’elles rapportent, avec le tems, de très-bons fruits.

Pour vous mettre en état d’essayer si les cantons en bruyère dans ces pays peuvent être de même améliorés, on vous adresse des exemplaires d’une instruction à ce