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les autres avec de la toile cirée ; nous-mêmes, dit M. Schabol, quand esclave d’une routine aveugle & novice dans le jardinage, nous travaillons sans réfléchir, avons fait la dépense de faire venir plusieurs charretées d’écorce d’arbres, pour appliquer devant les espaliers de notre campagne. Mais chose singulière ! malgré tous ces préservatifs, les arbres n’en ont pas moins brûlé jusqu’ici, par-tout, comme à Montreuil, & l’on y replante sans fin au midi. À cette exposition, dit-on, les arbres ne se plaisent pas, & l’on n’examine pas le pourquoi. On ne fait pas attention que la brûlure a lieu aux autres expositions.

Au levant & au couchant, ils sont aussi brûlés, mais bien moins ; on y met également des garnitures qui ne remédient pas mieux au mal.

La paille dont on entoure les tiges, outre qu’elle sert de réfuge à une peuplade infinie d’insectes, chenilles, limaçons, perce-oreilles, pucerons, &c. non-seulement prive la tige des bienfaits de l’air, pour laquelle elle est faite, comme les racines pour être bénéficiées par l’humidité de la terre ; mais elle occasionne la brûlure comme on va le voir : en outre, lors des humidités, cette paille qui reste mouillée en dedans & dans le fond, ne sert qu’à morfondre la séve par la pourriture & la croupissure ; enfin, occasionne à la peau des taches livides, produisant les chancres. Dépouillez l’un des arbres, & vous connoîtrez le fait par vous-même. Lors des gelées, quand cette paille est mouillée, elle gèle nécessairement l’écorce sur laquelle elle est appliquée.

Considérez dans les espaliers un peu anciens, certains vieux pêchers étiques, qui n’ont plus par derrière qu’une petite pelure qui leur charie la séve ; ils furent empaillés la plupart dans le tems, cependant ils n’ont pas moins brûlé. Ainsi la paille appliquée aux arbres d’espalier, loin d’être un préservatif, est, au contraire, nuisible par le fait même.

Les douves, les planches, les tuiles ne sont pas si nuisibles que la paille, mais elles font un mal réel, en privant la tige des bienfaits de l’air, dont, par leur présence, le cours & la circulation ne peuvent avoir lieu qu’imparfaitement : d’ailleurs, elles conservent toujours une certaine humidité sur la tige & sur le pied de l’arbre. Le jardinier sensé qui raisonne & qui examine, fait à ce sujet des réflexions, pendant que le jardinier de routine imagine que ses expédiens sont de vrais préservatifs ; il reste dans son préjugé, & voit périr ses arbres.

Quant au maillot de grosses toiles épaisses & toiles cirées, c’est pis que tout le reste, à raison de l’interception de l’air. Si tous ces préservatifs ne garantissent pas les arbres de la brûlure, on doit donc conclure que cette brûlure ne vient pas du soleil d’été. Comment brûlent-ils ces arbres ? c’est ce qu’il faut exposer.

Durant l’hiver, il tombe sur les arbres en général, & sur ceux d’espalier, des neiges, des gelées blanches, des givres, du grésil & toutes sortes de frimats. Lors donc