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Après avoir tracé la naissance & l’accroissement du bouton, pénétrons dans son intérieur, détaillons-le pièce par pièce, jusqu’à ce que nous soyons parvenus au germe ; à chaque pas nous trouverons l’occasion d’admirer la nature, & d’être étonné du merveilleux appareil qu’elle prépare à la jeune branche, & qui l’accompagne jusqu’à son entier développement.

Les premières parties qui s’offrent à la vue sont des feuilles épaisses, dures, lisses à l’extérieur, ou plutôt des écailles creusées en cueilleron, qui se recouvrent les unes les autres. Elles sont si serrées entr’elles qu’il est impossible à l’eau de pénétrer à travers. Dans certains sujets, on en distingue facilement plusieurs rangs ; les extérieures ont toujours une couleur de brun foncé, quelquefois de rouge ; les intérieures sont plus minces, plus tendres, plus succulentes, & presque toujours d’un verd assez doux. On en voit sans appendice au sommet, d’autres avec un seul appendice, comme dans le pommier précoce, le prunier ; avec plusieurs, comme dans l’abricotier, &c. &c. Les unes & les autres sont garnies en dedans de poils qui forment comme une espèce d’ouate. Ces poils sont d’une substance si délicate, qu’ils sont transparens, vus au microscope. Non-seulement on les remarque sur les bords de ces écailles, mais ils tapissent encore l’intérieur, & plusieurs espèces en portent à l’extérieur. Il faut bien distinguer ici ces poils adhérens aux écailles, des touffes de poils que l’on retrouve dans l’intérieur du bouton de certains arbres.

Les écailles de nature herbacée semblent être une simple prolongation de la substance corticale ; elles ne servent, pour ainsi dire, qu’à emmailloter le tendre bourgeon ; car dès qu’il a acquis assez de force pour se passer de leur secours, elles se détachent de la tige & tombent. La plupart de ces écailles sont pourvues de mamelons & de glandes, à travers lesquels suinte une liqueur visqueuse & gluante, qui les fait adhérer très-intimement les unes contre les autres, & qui empêche l’eau de pénétrer dans leur intervalle.

Immédiatement après les écailles, l’on remarque des filets très-minces, de différentes figures ; dans certains arbres, ce sont de vraies feuilles passagères, que l’on peut comparer aux cotyledons, ou feuilles séminales, & qui comme elles servent à épurer la séve ou la nourriture que le germe renfermé dans le bouton tire de la tige ; elles meurent & tombent comme elles dès que leur service est inutile. Dans d’autres arbres, ce sont des paquets de filets plus ou moins épais, qui enveloppent immédiatement le germe. Ces feuilles sont donc bien distinctes des feuilles véritables, & comme elles périssent durant le développement total du bouton, Malpighi a eu raison de les nommer caduques, folia caduca, tandis qu’il a désigné les autres sous celui de stables, folia stabilia. La forme de ces feuilles caduques varie non-seulement dans les divers sujets, mais souvent encore sur le même pied & dans le même bouton. Elles ont la forme d’une mitre dans le figuier, dans le mûrier & le châtaignier ; elles sont concaves, oblon-