Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1782, tome 2.djvu/407

Cette page a été validée par deux contributeurs.

une vie languissante en bute à mille maux. Il naît dans les souffrances, son premier soupir est celui de la douleur, ses premiers cris sont ceux de la plainte ; la foiblesse l’accompagne, les principes qui le soutiennent, tendent continuellement à perdre leur accord & leur harmonie ; le plus petit dérangement occasionne des ravages affreux. À peine parvenu à son état de force & de perfection, qu’il tend continuellement à son dépérissement ; les maladies assiègent ses vieux jours, l’infirmité annonce sa destruction, une nécessité cruelle & sans cesse agissante, le précipite vers le tombeau ; il l’atteint enfin : il a vécu. Malheureux qu’il est, ne trouvera-t-il donc aucun secours dans la carrière de la souffrance ? n’est-il pas de main charitable qui allégera sa douleur, qui la dissipera ? personne ne l’aidera-t-il à vivre & à jouir de cette vie passagère ? Oui, & ce bienfait inestimable sera encore dû à la botanique. Elle trouvera, dans les végétaux, non-seulement le palliatif de tous nos maux, mais encore leurs remèdes souverains ; elle nous rend une seconde vie, la santé, le plus précieux des biens, celui que ni les trésors ni les grandeurs, ne peuvent suppléer. Des familles, des genres, des classes entières possèdent des vertus médicamenteuses, il n’est point de remèdes que la nature ne nous présente : ici des purgatifs & des vomitifs, là des alexipharmaques puissans ou des rafraîchissans ; plus loin des antiseptiques croissent à côté des vulnéraires, des fébrifuges, des cordiaux, des carminatifs, &c. &c. Quelle profusion, quelle richesse ! ajoutons, quelle sûreté, quand nous employons les végétaux d’après l’indication de la nature !

III. Des plantes propres aux arts & aux métiers. L’homme a trouvé sa subsistance dans les plantes alimentaires ; les médicinales ont soulagé son existence ; son industrie n’en est pas restée là. Les arts ont façonné & embelli son séjour, il en renaît de tous côtés pour satisfaire ses desirs, ils se multiplient comme ses pensées, & la botanique va lui choisir les végétaux dont il peut tirer le plus grand parti. Sous mille formes variées, les arbres majestueux, tantôt soutiennent ses édifices, & le défendent lui-même des injures des saisons, tantôt les décorent & les enrichissent. La charpente, la ménuiserie, le charronage, &c. trouvent dans le règne végétal leur matière première. L’homme n’emploira-t-il que les arbres qui peuplent les forêts ? Ces plantes qui végètent humblement à l’abri de leur feuillage, lui seront-elles inutiles, ou n’y trouvera-t-il que sa nourriture & ses remèdes ? Mais toutes ne peuvent pas remplir ses desirs dans cet objet. Les négligera-t-il, dédaignera-t-il de les admettre à son service ? Non ; il ne faut rien négliger dans la nature. Dans toutes ses productions on reconnoît sa prodigalité & ses vues généreuses ; à chaque pas un bienfait ou une ressource. L’art de la teinture est sur le point de faire les progrès les plus rapides, en cherchant sa matière colorante dans les végétaux. Déjà la botanique tinctoriale annoncée par Linné, aug-