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sauvage ; ce qui certainement ne dit rien. L’auteur du Dictionnaire Économique cite toutes les espèces décrites par le chevalier Von Linné, & ne concilie pas pour cela les dénominations admises par les jardiniers ; la confusion est la même. M. Mallet, dans une petite brochure sur la culture de l’asperge, imprimée à Paris en 1779, en distingue trois espèces ; savoir, celle d’Allemagne, ou asperge commune ; celle de Hollande ou de Marchienne ; celle de Gravelines ou maritime. M. Mallet dit que la Marchienne dégénère après cinq ou six ans ; que celle de Gravelines subsiste plus de vingt ans en bon état ; & M. Fillassier, au contraire, dans son ouvrage intitulé : Culture de la grosse Asperge de Hollande, imprimé à Paris en 1779, regarde cette espèce comme la plus précoce, la plus hâtive, la plus féconde & la plus durable que l’on connoisse. Comment concilier ces contradictions, puisque M. Mallet donne une description de son asperge de Gravelines, qui convient à toutes les espèces ou variétés cultivées dans les jardins, & M. Fillassier ne dit pas un seul mot qui caractérise son asperge de Hollande, connue ailleurs sous la dénomination d’asperge de Darmstad, de Pologne, de Strasbourg, de Besançon, de Vendôme ? Il seroit fastidieux pour le lecteur & pour moi, d’entrer dans un plus grand détail sur les dénominations & sur leurs abus. L’auteur de l’École du Jardin potager, a raison de dire que ces espèces jardinières ne diffèrent entr’elles que par la grosseur. On peut, je crois, reconnoître leur filiation. L’asperge qui croît naturellement dans les îles sablonneuses du Rhône, de la Loire, du Rhin, &c. & que Bauhin a appelée asparagus sylvestris, a fourni par succession de tems & par les semis, l’asperge commune, ou asparagus sativa. La semence de celle-ci, & même de la première, chariée par les eaux des fleuves & des rivières à la mer, & qu’elle a ensuite rejetée sur ses rivages, a produit l’asperge maritime, ou asparagus maritima. Comme le terrain sablonneux des bords de la mer est sans cesse recouvert par les débris des plantes, des animaux qu’elle rejette, il s’y est formé un terreau, un sol plus substantiel & encore plus analogue à la bonne végétation de l’asperge ; dès-lors celle-ci est devenue plus grosse dans sa racine, ses feuilles ont été plus épaisses, & la tige mieux nourrie. Asparagus altitis. Voilà la seule différence qui existe entre toutes les trois. Les riverains ont cueilli la graine ; ils l’ont transportée dans leur jardin, où le travail & les engrais ont ajouté au premier degré de perfection que la plante avoit acquis sur les bords de la mer. Je sais que l’asperge maritime est restée toujours la même dans le Jardin des plantes à Paris, & qu’elle n’a pas été sensiblement améliorée. Cet exemple ne détruit point ce que je viens de dire. Au Jardin du Roi, l’asperge une fois semée & sortie dans un terrain quelconque, y reste à demeure, & n’a d’autre culture que la culture générale de toutes les autres plantes de la même plate-bande ; mais quelle différence de ce sol, de cette culture, avec le sol des jardins de Hollande, de Flandre