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thode seroit inutile ou ruineuse ; mais comme la multiplication qu’elle procure est de la dernière évidence, il faut commencer par traiter la première partie de la question dont la certitude est moins probable.

Il faut d’abord examiner les avantages & les désavantages, quant au profit direct de la méthode de nourrir le bétail à l’étable. Ce point une fois établi, le profit médiat ou secondaire qui suit de la multiplication des engrais, sera déterminé avec plus de précision.

Le profit immédiat & direct que donnent les bêtes à cornes, consiste, 1o. dans leur multiplication ; 2o. dans leur vente, quand elles sont grasses ; 3o. dans leur lait ; 4o. dans leur travail.

Tous ces avantages dépendent absolument de la santé parfaite du bétail ; & cette santé dépend à son tour principalement, 1o. d’une nourriture choisie, suffisante & réglée ; 2o. des soins qu’on prend de l’animal ; 3o., du repos qu’on lui accorde ; 4o. de la salubrité des eaux ; 5o. de la température de l’air auquel il est exposé.

Le plus grand nombre des pâturages appartient à des communautés, & sont vulgairement appelés communes, communaux. (Voyez ce mot) À peine la terre entr’ouvre-t-elle son sein aux premiers rayons du printems ; à peine apperçoit-on les premières pousses des plantes les plus hâtives, que voilà toute la communauté en mouvement. Presque tous les habitans, par une cupidité insensée, ont la mauvaise habitude de tenir à l’étable plus de bêtes qu’ils ne sont en état d’en hiberner ; & ils ne considèrent pas que quatre pièces de bétail, de quelqu’espèce qu’elles puissent être, nourries & entretenues convenablement, donnent plus de profit que six mal nourries. Ils se voient donc au bout de leurs fourrages. Ces pauvres bêtes affamées, trouvent des pâturages presque nus, ou, au lieu d’une pâture suffisante, elles sont réduites à dévorer ce qu’elles peuvent arracher des haies, des broussailles, & à charger leur estomac d’une nourriture indigeste ; des gelées, des pluies, des vents glacés qui les pénétrent, jettent dans leurs corps les semences des maladies que les ardeurs de l’été développent d’une manière funeste. L’été lui-même n’est pas à d’autres égards moins dangereux pour les bêtes qui pâturent ; elles sont assaillies par les mouches, les taons, & par une infinité d’autres insectes : souvent accablées de fatigues, dévorées de la soif, elles vont se désaltérer & s’empoisonner dans un bourbier d’eau croupie, verdâtre & puante. Enfin, le mielat (voyez ce mot) qui tombe inopinément sur des plantes succulentes, & dont le bétail est avide, est la cause immédiate des plus funestes maladies.

L’automne n’est pas sans inconvénient ; & pendant cette saison, ordinairement humide, le bœuf, la vache piétinent le terrain, foulent la plante & la racine, & endurcissent le sol au point que l’année suivante l’herbe y est rare. Si au contraire, on s’abstient de faire brouter les prairies en automne, les plantes à feuilles pourrissent & forment la couche de terre végétale, l’ame de la végétation. (Voyez le mot Terre végétale) Les