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suite. La main de l’artiste conduit bien plus facilement les jeunes branches, garnit ce qui est trop nu, & épaissit ce qui est trop clair. Dans l’un & dans l’autre cas, les pieds doivent être espacés au moins de dix-huit pouces ; le mieux seroit à deux pieds. C’est un abus de planter trop serré. On sait que le tronc de la charmille grossit beaucoup. Or, si on a planté à un pied de distance, les troncs, après quelques années, se toucheront à peu de chose près, & les petites branches périront insensiblement. C’est ce que l’on voit tous les jours.

La charmille ne se plaît pas, jusqu’à un certain point, dans nos provinces méridionales, à moins que par le secours de l’eau, la terre ne conserve une humidité suffisante ; on la supplée par le mûrier planté en porrette. Si le jardinier n’est pas au fait de la conduite de ce genre de palissade, elle sera détruite avant l’espace de dix ans. Comme on contrarie la nature, elle travaille toujours à reprendre ses droits, les pieds se dégarnissent, les bois gourmands se multiplient & s’emportent ; enfin, la verdure n’est plus qu’au sommet des tiges.

Plantez la porrette à deux pieds de distance ; & sous quelque prétexte que ce soit, ne coupez pas le pivot ; faites donc une fosse très-profonde. Si la reprise de l’arbre est due seulement aux chevelus, ces racines secondaires traceront horizontalement, & iront successivement chercher leur nourriture à plus de cinquante pieds ; malheur alors au potager, aux champs qui seront dans leur voisinage.

Coupez toutes les tiges à deux pouces de terre ; & dès la fin de la première année, commencez à plier horizontalement, & à assujettir sur ce plan les jeunes tiges ; mais s’il s’en élance quelques-unes trop droites, trop fortes, trop vigoureuses, pliez-les doucement dès que vous le pourrez ; enfin, ne laissez monter aucune tige perpendiculaire. Répétez la même opération, au moins deux fois pendant toutes les années suivantes. C’est le seul moyen de modérer l’impétuosité de la séve de l’arbre ; si on se presse de jouir, on perd tout.

Avec le laurier, la laurelle, le laurier-thym, on produira le même effet ; mais il faut de la patience. Il n’y auroit peut-être point de berceau mieux couvert, qu’avec le figuier qui produit les figues-fleurs, si l’odeur fatigante qui s’exhale de ses feuilles, ne dégoûtoit pas d’un pareil ombrage.

Dans nos provinces septentrionales, les berceaux de ce premier genre réussissent à merveille ; mais ils concentrent une humidité qui pénètre, cause des fluxions, &c. Dans nos pays méridionaux, ils deviennent le réceptacle de tous les insectes, & des cousins surtout ; de manière qu’il est impossible d’y respirer tranquillement le frais. Ces inconvéniens ont fait imaginer le second genre des berceaux.

Second genre. Des berceaux en arcades. Ils diffèrent des premiers par les ouvertures symétriques qu’on laisse de distance en distance. Il y a deux manières de les pratiquer. Dans la première, l’allée est plantée en plein, c’est-à-dire que la partie inférieure correspondante à l’ouverture de l’arcade, est tenue