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riture ; si on les nourrit, on réserve pour cette époque, tout ce qu’il y a de plus mauvais. Propriétaires, soyez humains ; venez à votre aire, voyez par vous-mêmes leurs travaux, & jugez de leurs peines. Levés avec le soleil, exposés à son ardeur pendant les deux mois les plus chauds de l’année, ils ne quittent le travail que lorsque la nuit les force de l’abandonner, & c’est le moment de toute la journée où leur chemise va commencer à sécher. Donnez-leur du vin, ils en supporteront mieux la fatigue ; & si le vin est trop cher, ne leur refusez pas au moins du vinaigre pour corriger l’eau qu’ils boivent, tempérer la soif qui les dévore, & les rafraîchir. Je ne connois qu’une seule province ou le batteur ne soit pas vexé par le propriétaire ; il lui fait la loi ; c’est dans le Bas-Languedoc. S’il vous en coûtoit une pistole ou deux de plus, vous ne seriez pas appauvri, ces malheureux vous béniroient, & ce petit sacrifice augmenteroit singuliérement leur bien-être. Il faut si peu pour contenter celui qui n’a rien, & il en coûte si peu pour se l’attacher !


BATTRE LES GERBES. Dans les années pluvieuses, les herbes fourmillent, croissent, grainent & mûrissent avec les blés. La faucille abat également la bonne & la mauvaise plante, & tout est confondu dans la gerbe. Lorsque la gerbe est séche, quelques personnes la font porter sur l’aire & battre à demi avec le fléau sans la délier, afin de détacher la majeure partie du bon grain. La gerbe relevée, ce grain est mis à part, & la gerbe ensuite déliée & battue de nouveau, donne le reste du grain mêlé avec les semences étrangères. Je ne vois ici qu’une opération inutile ; le van, le crible, feront la séparation du bon & du mauvais grain. C’est multiplier la dépense sans nécessité.


BATTRE DU FLANC. Se dit d’un cheval poussif ou d’un cheval qui a la fièvre ou une autre maladie qui se dénote par une agitation de son flanc, plus forte qu’à l’ordinaire.


BAUCHE, ou Bauge, ou Torchis. C’est une espèce de mortier fait avec de la terre franche, corroyée avec de la paille ou du foin haché. On s’en sert, soit pour lier les pierres d’un mur, soit pour boucher les vides entre les chevrons qui forment toute la carcasse d’une maison. Il n’est pas possible d’imaginer une maçonnerie plus défectueuse pour tous les genres.

Examinons l’effet qui résulte de l’union de la paille & de la terre. La paille ou le foin occupent un plus grand espace au moment qu’on les gâche avec la terre. La terre, en séchant, prend de la retraite, se gerce, & par conséquent n’occupe plus le même espace qu’auparavant ; dès-lors les pierres sont mal jointes, moins liées. Si on applique ce mortier contre le bois, contre les chevrons, l’humidité fait renfler le bois, & le bois presse contre la terre. Cette terre se dessèche, le bois se dessèche à son tour, & si reste nécessairement un vide entre deux.

Ce mortier, qui ne sauroit se cris-