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porter avec soi une poignée de grain, la peser en arrivant au logis, & la laisser quelques jours au soleil : cette épreuve dissipera l’eau surabondante qui ballonnoit le grain, & indiquera, en le pesant de nouveau, la différence réelle de ses deux états ; dès-lors on sera assuré de la quantité du grain qui doit se trouver dans une mesure. Combien de vendeurs arrosent leur avoine quelques jours avant de la livrer ! Combien d’acheteurs la trouvent bonne parce qu’elle est pesante !

Avant de donner l’avoine aux animaux, il faut qu’elle soit bien séche, qu’elle ait sué son eau de végétation, sans quoi elle leur est plus nuisible que profitable. Quelle qualité delétère ne doit donc pas avoir une avoine mouillée sur le champ, tenue à l’humidité dans le magasin ? &c. Il en est ainsi du foin naturel, du foin-avoine, &c. Le mieux est de ne s’en servir que trois mois après la récolte.

Toutes les fois que le palefrenier donnera l’avoine, ayez soin de la faire cribler, afin de la purger de tous les corps inutiles ou étrangers. Le crible en séparera sur-tout une poussière fine & une espèce de duvet qui picotte & s’attache au gosier de l’animal. Il doit être mené à l’abreuvoir, ou abreuvé à l’écurie avant de manger l’avoine. Ce grain le nourrit, ranime ses forces, le tient en haleine & dispos pour le travail. Il est assez inutile de lui en donner lorsqu’il ne travaille pas, ou du moins, il convient d’en diminuer la quantité, surtout aux bœufs.

En examinant les grains d’avoine dans les excrémens des chevaux qui s’en sont nourris, on apperçoit que la plupart sont encore dans un état d’intégrité. Les excrémens des bœufs & des vaches n’en présentent aucuns, parce que dans la rumination, il les ont broyés exactement. Ces grains dans les excrémens du cheval sont gonflés par l’humidité, & cette humidité leur donne une forte propension à germer pour peu que les circonstances le permettent. Ce qui prouve bien que ce grain est peu altéré, & qu’il a peu perdu de sa qualité alimentaire, c’est l’avidité des poules, des oiseaux, à fouiller ces excrémens afin de les manger ; ce qui suffiroit pour démontrer combien l’usage de donner le grain entier aux animaux est abusif.

Cette observation faite dans différens pays, a donné naissance à la publication de plusieurs méthodes, pour remédier à l’inconvénient dont il s’agit.

Les uns ont proposé de faire moudre l’avoine, & de la donner ainsi aux animaux ; les autres ont prétendu qu’il falloit la convertir en pain ; enfin, quelques-uns ont indiqué de la faire macérer dans l’eau quelques heures avant de la donner à manger ; mais ne seroit-ce pas un autre abus que de trop favoriser la digestion d’une nourriture qui doit être très-solide, pour exercer suffisamment les jeunes estomacs ? Ces méthodes conviendroient plutôt aux vieux animaux, qui, ne pouvant exécuter une bonne mastication, rendent presque tous les grains tels qu’ils les ont avalés.

On nourrit toutes sortes de volailles, & les cochons avec ce grain. Il rend le lard doux, & d’un goût excellent ; si on a l’attention de donner aux cochons un peu de pois