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se déssechera, elle prendra de la retraite, elle s’affaissera, & la maison avec elle. On sent facilement quelles dangereuses suites peuvent avoir de pareils événemens répétés jusqu’à un certain point. On doit donc avoir un très-grand soin, lorsqu’on bâtit & que l’on rencontre un banc d’argile, d’aller plus avant, de pénétrer au dessous, & de n’établir les fondemens que sur un terrain sec & ferme. Si le banc étoit trop considérable & trop épais, un pilotage préviendroit tous les accidens.

La nature est un grand maître qui donne à l’homme des leçons continuelles. Heureux quand il en profite ! Le moyen dont elle se sert pour retenir les eaux ne pouvoit nous échapper ; nous en avons tiré le plus grand profit, soit pour notre utilité, soit pour notre agrément ; & ces pièces d’eau, qui forment les embellissemens de nos jardins, ou qui fournissent aux animaux de quoi se désaltérer, ne sont dues souvent qu’à des couches artificielles d’argile que nous avons l’art de construire autour de ces bassins.

L’industrie humaine tire le plus grand parti des argiles dans ses manufactures. Tantôt la pétrissant, & lui donnant une forme agréable sur le tour, elle en forme des vases aussi commodes qu’élégans ; tantôt elle s’en sert pour fouler & dégraisser les étoffes ; tantôt enfin, sous des doigts savans, elle prend les traits & la ressemblance des mortels dont on veut conserver l’image.

Mais tous ces avantages ne sont rien auprès de ceux que l’on en retire dans l’agriculture. M. M.


II. De l’Argile relativement à l’Agriculture.


Malheur au propriétaire dont la majeure partie de son terrain est argileuse. S’il habite un climat où les pluies soient fréquentes en hiver, son grain végétera d’une manière languissante, il jaunira ; enfin, noyé par l’eau, il pourrira. En supposant le printems assez sec, la glaise se durcira, les canaux séveux de la plante seront comprimés, le collet étranglé, & la tige ne pourra s’élever. En supposant que cette plante ait souffert de la sécheresse, & sur-tout de l’étranglement à l’époque où la tige devoit s’élever ; s’il survient des pluies, elles humecteront la terre, pénétreront ses pores, dissiperont leur trop forte adhérence ; enfin, la plante végétera avec force, les feuilles fanées s’éleveront avec la tige, l’épi se formera ; il aura la plus belle apparence, & cependant cet épi sera peu grainé, & son grain petit & retrait, à moins que depuis le moment de la fleur jusqu’à celui de la récolte, les circonstances les plus heureuses de la saison ne réparent le premier mal. Toutes les plantes graminées ont en général deux époques à redouter ; celle où elles commencent à pousser leur tige, & celle où elles fleurissent.

On a improprement appelé ces terres froides ; elles ne sont pas plus froides par elles-mêmes que toutes les autres terres. Un thermomètre plongé dans l’argile ou dans le sable, toutes circonstances égales, marquera le même degré de chaleur. Elles ont été appelées froides pour désigner la lenteur de la