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écaille très-solide, qui se terminent en pointe. Cet ouvrage, propre à exercer son courage & sa patience, l’occupe souvent pendant des mois entiers : quand elle est assez heureuse pour rencontrer des bois pourris, son travail, moins pénible, n’est point aussi long. Après avoir pratiqué plusieurs trous en forme d’alvéoles ou de cases dans l’épaisseur du bois, elle dépose un œuf dans chacune, la remplit d’une pâtée faite avec du miel & de la cire brute, afin que le ver qui doit naître soit au milieu des alimens nécessaires à son accroissement. La femelle ayant ainsi pourvu à la subsistance de sa famille, ferme chaque alvéole avec un couvercle fait de la sciure de bois, humectée d’une matière visqueuse ; elle abandonne ensuite son nid.

Lorsque les vers ont pris tout leur accroissement, qu’ils ont subi leurs différentes métamorphoses, l’abeille perce le couvercle qui la tient renfermée, pour aller chercher des alimens qu’elle ne trouve plus dans son habitation, où elle a été abandonnée par sa mère. La famille se disperse donc à mesure qu’elle quitte l’état de nymphe pour vivre d’une manière analogue à son espèce.


Section III.

Abeilles-Maçonnes.


L’abeille-maçonne ressemble, quant à la figure & à la grosseur de son corps, aux mâles des mouches-à-miel. Le mâle & la femelle de cette espèce ne diffèrent que par la couleur : celle du mâle est fauve ; la femelle est noire en dessus, & très-velue ; en dessous, elle est un peu jaune. Les individus de cette espèce ne vivent point en société. Dès que le mâle a rempli son objet, qui est de féconder la femelle, il s’en sépare pour mener une vie libre & exempte des soucis qu’il devroit prendre de sa postérité ; il laisse ces soins à la femelle, qui après s’en être acquittée, abandonne aussi sa famille.

Pour construire le domicile où elle veut placer ses œufs, l’abeille-maçonne choisit les murs exposés au midi ; c’est-là qu’elle bâtit une habitation solide avec du sable très-fin & de la terre qu’elle mêle ensemble : pour en faire une espèce de mortier, elle dégorge de son estomac une liqueur visqueuse qui lui sert à détremper ces matériaux, avec lesquels elle forme des cellules d’un pouce de hauteur sur six lignes de diamètre : elle a soin de bien polir l’intérieur & de laisser l’extérieur raboteux. Lorsqu’elle travaille avec beaucoup d’activité, ce qui arrive si elle est pressée de pondre, dans un jour elle parvient à construire une cellule. Après qu’elle en a fait huit ou dix, disposées sans ordre, & séparées les unes des autres par une maçonnerie, elle recouvre le tout avec un mortier épais. Ce nid paroît alors une bosse qui a la forme de la moitié d’un œuf appliqué contre un mur. Son édifice étant fini, elle dépose un œuf dans chaque cellule ; elle va ensuite chercher la provision nécessaire à l’accroissement de ses larves, qui consiste dans une gelée composée de miel & de cire brute, dont elle remplit chaque cellule. Après avoir pourvu à la subsistance