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fœtus tombe dans le bassin, brise ses enveloppes, & aidé par les efforts de la mère, les siens propres, l’irritabilité de l’utérus, les liens du placenta étant rompus, il vient jouir enfin de l’air & de la lumière. Les ovipares ont à peu près le même sort ; mais on peut dire de plus qu’ils éprouvent deux accouchemens. L’œuf naît d’abord recouvert d’une coquille épaisse & de membranes ; le blanc & le jaune enveloppent le germe ; il faut ensuite que le tems de l’incubation passé, la coquille soit brisée, les membranes déchirées, pour que le poulet paroisse au jour. La graine éprouve pareillement deux espèces de naissance. Comme l’œuf elle quitte le réceptacle, environnée d’un péricarpe plus ou moins épais. Tant qu’elle est dans le réceptacle, elle prend un vrai accroissement ; mais cet accroissement ne va que jusqu’à la perfection du germe, & non à son entier développement. Les sucs alors qui l’ont nourri, cessent de se porter vers lui, & même de s’élaborer. Les fibres qui tenoient le péricarpe clos & fermé, se relâchent d’elles-mêmes ; il s’ouvre, & la graine s’échappe. Voilà sa première naissance ; la seconde est due à la germination, comme celle de l’œuf à l’incubation. Les sucs de la terre ayant ramolli la tunique propre (arillus), elle se fend insensiblement par la dilatation des cotyledons qui se remplissent des sucs nourriciers, la plumule se déplie, grossit, croît & s’élève hors du sein de la terre, tandis que la radicule va pomper les sucs les plus propres qui doivent fournir à toute la plante le principe de son accroissement.

Si nous trouvons tant de rapports entre le fœtus, l’œuf & la graine, depuis l’instant de leur conception jusqu’à celui de leur naissance ; mieux connus, plus étudiés dès qu’ils ont vu le jour, ils en fournissent de plus grands encore durant le cours de leur vie.


Accroissement, Enfance, Nutrition.

La plante hors de terre, & l’animal respirant, commencent tous deux une nouvelle vie, fondée sur les mêmes principes, soit que l’un suce un lait nourricier, soit que l’autre s’incorpore & s’assimile les sucs de la terre. L’enfant, foible encore, & incapable de se procurer une nourriture propre, vient-il à être arraché de la mamelle, il expire bientôt, à moins qu’on ne lui tende un sein secourable. Arrachez de même les cotyledons & les feuilles séminales d’une jeune plante, l’intempérie de l’air l’affecte cruellement, l’ardeur du soleil la desséche ; privée d’un suc nécessaire, elle languit, dépérit, & meurt. Leur foiblesse & la délicatesse de leurs membres & de leurs organes, viennent de la trop grande abondance du tissu cellulaire, & de la quantité de fluides qui l’emportent sur les solides. Mais tout change insensiblement ; les parties molles se durcissent, les solides se multiplient, l’accroissement s’établit ; la respiration dans les uns, la transpiration dans les autres, animent & donnent le mouvement à toute la machine. La circulation du sang dans l’animal, la force de succion dans la plante, portent l’humeur nutritive vers tous les points du corps ; elle pénètre & se fixe dans