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vrir celle qui lui convient le plus. Cela fait, le propriétaire prend l’étalon, le mène à l’écurie & l’y laisse jusqu’au surlendemain.

L’ânesse rejette souvent en dehors la liqueur qu’elle vient de recevoir dans l’accouplement, à moins qu’on n’ait soin de lui ôter promptement la sensation du plaisir, en la fouettant & en la faisant courir. Lorsqu’elle est pleine, la chaleur cesse bientôt ; elle ne peut souffrir l’étalon, le refuse, & s’en défend vigoureusement.

Le foin, la luzerne, le son, l’orge concassé, les herbes fraîches sont de très-bons alimens pour l’ânesse qui est pleine, pourvu qu’ils n’aient aucune mauvaise qualité, comme, par exemple, le foin pourri, l’herbe des marais, &c. une pareille nourriture lui feroit du mal, & par conséquent au fétus qu’elle porte : un plus grand soin encore est de ne point la surcharger, sur-tout dans les derniers mois ; elle risqueroit d’avorter. (Voyez Avortement) Par la même raison, on doit éviter de lui donner des coups sous le ventre, & ne l’envoyer au pré le matin, que lorsque le soleil aura dissipé la gelée blanche. Le ventre commence beaucoup à s’appésantir le sixième mois : en y mettant la main dessous, on sent quelquefois remuer. Le lait paroît dans les mamelles au dixième mois. L’ânesse met bas dans le douzième d’un petit, qui présente la tête la première. Il arrive souvent que l’accouchement est laborieux & difficile. On le favorise en mettant le petit en situation. La conduite des gens de la campagne, qui donnent du vin & de l’orviétan à haute dose dans cette intention, ne sauroit être approuvée. Bien loin de rendre les efforts de la nature fructueux, ces remèdes tendent au contraire à enflammer le col de la matrice & à retarder l’accouchement. Les relâchans, les adoucissans, & sur-tout la saignée, sont infiniment plus avantageux. Si le poulain est mort, il faut le tirer avec des cordes, après avoir fait entrer un peu d’huile dans la matrice pour en faciliter la sortie.

Dès que l’ânon est né, la mère le lèche pour le sécher. Peu de tems après il se tient debout, chancèle, tombe à cause des articulations qui ne peuvent le soutenir. Sept jours après l’accouchement, la chaleur se renouvelle dans l’ânesse, & elle est en état de recevoir le mâle.

Le véritable moyen de rétablir ses forces après l’accouchement, est de lui donner pendant quatre ou cinq jours de l’eau tiède, contenant une bonne jointée de farine de froment, du foin de bonne qualité, & de la conduire dans de bons pâturages. L’habitude de certains campagnards, qui, deux jours après l’accouchement, font travailler l’ânesse, est à blâmer : en éprouvant trop tôt les forces de cet animal, il ne peut suffire à un travail médiocre, & l’ânon ne trouve point le lait nécessaire pour se nourrir.

Douze ou quinze jours après la naissance de l’ânon, deux dents lui poussent sur le devant de chaque mâchoire ; quinze jours après, deux autres percent à côté des premières venues ; trois mois après, deux autres qui forment les coins ; de sorte qu’on apperçoit alors douze dents à la partie antérieure de la bouche, six dessus, & six dessous. Ces dents