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toient un grain bien nourri. Ce pot ne fut hors de la terre qui l’environnoit que pendant vingt-quatre heures ; & quoique M. Tillet le remît dans le même endroit où il avoit d’abord été placé, & le terrain auparavant arrosé tout autour, cependant la touffe de blé commença à languir ; les tiges jaunirent en peu de tems, les épis se desséchèrent ; & d’une touffe de blé si vigoureuse, M. Tillet n’en tira qu’un grain maigre, retrait, & réduit en partie à la simple écorce.

D’après les expériences de M. Tillet, nous pouvons dire que les amendemens doivent avoir pour but de faire contracter à la terre la qualité de ne retenir l’eau que dans la proportion exacte qui convient à chaque espèce de grain ; que si la terre est trop compacte & retient l’eau en surabondance, elle pourrira les racines ; que si cette terre se dessèche, les racines n’ont plus la force de la pénétrer, & la plante languit en raison des obstacles qu’elle doit vaincre & qu’elle ne peut surmonter ; que si la terre est trop légère, la sécheresse détruit la plante ; & qu’au contraire, si la saison est pluvieuse jusqu’à un certain point, la plante prospère, parce que la terre ne retient que l’eau nécessaire à la végétation des plantes qui lui sont confiées.

Il paroît, au premier coup d’œil, qu’on devroit conclure des expériences de M. Tillet, que l’eau seule produit la végétation. En effet, quelle substance savonneuse peut-on trouver dans des retailles de pierre, dans du sablon ? &c. &c. mais on ne fait pas attention que cette essence spiritueuse, si je puis m’exprimer ainsi, tend toujours à se sublimer, à s’élever de la terre, & par conséquent que du sol du champ elle s’insinuoit & pénétroit jusqu’aux racines, par les trous pratiqués au fond des pots. Les matières qu’ils renfermoient, ressembloient à des éponges qui absorboient & l’humidité de la terre du champ dans laquelle il étoit enterré, & les substances savonneuses que cette humidité tenoit en dissolution. L’eau seule ne produit point la végétation, elle y contribue pour beaucoup, comme on le voit par les oignons de fleurs qui végètent dans des carafes pleines d’eau. Il vaudroit tout autant dire que l’air seul produit la végétation, puisqu’un oignon de scille ou squille, suspendu à un plancher, y pousse une tige de plusieurs pieds, y fleurit, &c. Il faut compter pour beaucoup les émanations qui se trouvent mêlées avec l’air atmosphérique, ainsi que nous l’avons fait voir dans le Chapitre premier, en considérant cet air comme un amendement naturel. Il est tems de passer aux détails des différens amendemens artificiels.

Tous les corps s’amendent les uns par les autres, lorsqu’ils sont en quantité requise, & lorsque leurs principes mécaniques ne s’y opposent pas.

Il y a deux sortes d’amendemens : les uns dépendans des travaux de l’homme, & les autres des engrais. Pour les premiers l’homme travaille, ou seul, ou aidé par les animaux ; & quant aux seconds, la nature entière est le dépôt qui les fournit.

Les amendemens ont rapport ou aux jardins potagers & fruitiers, ou aux prairies naturelles & artifi-