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L’Histoire Naturelle, dans son discours sur la nature des animaux, trop prévenu contre l’esprit géométrique qu’ont accordé aux abeilles les philosophes qui les ont observées dans la construction de leurs ouvrages, a voulu rendre raison de la figure exagone qu’elles donnent à leurs cellules, par une comparaison qui ne répond point à toutes les conditions du problême. Voici comment il s’explique. « Qu’on remplisse un vaisseau de pois, ou plutôt de quelqu’autre graine cylindrique, & qu’on le ferme exactement après y avoir versé autant d’eau que les intervalles qui restent entre ces graines en peuvent contenir ; qu’on fasse bouillir cette eau, tous ces cylindres deviendront des colonnes à six pans : on en voit clairement la raison, qui est purement mécanique. Chaque graine, dont la figure est cylindrique, tend par son renflement, à occuper le plus d’espace possible dans un espace donné ; elles deviennent donc toutes nécessairement exagones par la compression réciproque. Chaque abeille cherche à occuper de même le plus d’espace possible dans un espace donné ; il est donc nécessaire aussi, puisque le corps de l’abeille est cylindrique, que leurs cellules soient exagones, par la même raison des obstacles réciproques. »

Qu’il me soit permis de répondre à l’éloquent auteur de l’Histoire Naturelle, que cette comparaison du mécanisme des abeilles dans la construction des alvéoles, de même que cette autre qu’il apporte des dix mille automates qui seroient renfermés dans un même endroit, &c. n’offrent point la solution du problême, ni la raison de la figure exagone que les abeilles donnent à leurs édifices. Que deviennent ces comparaisons, lorsqu’on reconnoît que les six pans de cellules ne sont pas égaux ; qu’il y en a deux qui sont constamment plus petits que les autres, ainsi que l’a démontré M. de Réaumur dans son huitième Mémoire sur les abeilles, pag. 398. Les mêmes ouvrières construisent les cellules des faux-bourdons, qui sont plus grandes que les leurs, & qu’on trouve placées indifféremment sur les gâteaux. Leurs dimensions varient dans un rapport déterminé, à la taille des vers qui doivent y croître : c’est encore ce que M. de Réaumur a prouvé en déterminant, d’après les mesures qu’il a prises, le diamètre & l’axe de ces différentes cellules, qui varient selon la taille du ver qui l’occupe. Swammerdam avoit aussi observé cette variété dans le diamètre & l’axe des cellules des faux-bourdons & des ouvrières ; il en avoit donné les mêmes mesures que M. de Réaumur a trouvées ensuite. Après cela, comment est-il possible de dire avec M. de Buffon, « que chaque abeille cherchant, comme les pois, à occuper le plus d’espace possible, dans un espace donné, il est nécessaire aussi, puisque le corps de l’abeille est cylindrique, que leurs cellules soient exagones, par la même raison des obstacles réciproques ? »

Le fond de chaque cellule est une cavité pyramidale composée de trois rhombes assez constamment