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Ce semis sera placé l’automne suivante, dans une caisse à vitrage. Dès les derniers jours de Septembre de l’année suivante, on transplante ces petits alaternes dans une ou plusieurs caisses plus grandes que les premières, à cinq pouces les uns des autres. On pourra en planter le tiers dans des pots, où ils resteront jusqu’à ce qu’on les mette sur place. Quant à la petite pépinière encaissée, on peut y laisser les arbustes pendant un ou deux ans ; ensuite, selon les climats & les commodités, on les mettra en pépinières à dix pouces les uns des autres, contre un mur au couchant, ayant l’attention de les couvrir durant la rigoureuse saison, ou bien on les plantera à demeure, en les couvrant aussi dès que les gelées deviendront un peu fortes.

Il ne faut pas négliger la voie des marcottes : elle est utile pour ceux qui ne peuvent se procurer de la graine, & elle sert à multiplier les espèces les plus rares ; mais elle est indispensable pour les alaternes panachés, car leur graine reproduit rarement cette variété.

Les marcottes doivent se faire vers le 20 Septembre. Qu’on couche doucement les jeunes branches dans une petite cavité creusée pour cet effet, où l’on aura apporté de la terre fraîche, mêlée de terreau ; qu’on y essaie la courbure de la branche, pour juger où pourra tomber la partie la plus inférieure de la courbure. Qu’on fasse en cet endroit une coche qui entame le tiers de l’épaisseur du bois ; qu’on applique cette coche contre terre, en y assujettissant la branche avec un crochet de bois ; qu’on relève ensuite doucement le bout de la branche contre un bâton sur lequel on la liera, sans néanmoins trop l’obliger à prendre la perpendiculaire, lorsqu’elle ne s’y dispose pas naturellement ; qu’on couvre de mousse ou de litière sèche les pieds de ces marcottes ; qu’on les arrose de tems à autre : l’automne suivante elles seront pourvues de racines ; alors on pourra les transplanter, mais avec beaucoup de précautions & de soins : si on veut être sûr de la reprise, il faudra attendre encore un an.

Les alaternes perdent leurs feuilles & leur jeune bois dans les serres humides. On en doit conserver quelques pieds, surtout des panachés, dans de bonnes orangeries. Ils passent très-bien l’hiver dans des caisses à vitrage, lorsque l’on a soin de leur donner de l’air toutes les fois qu’on le peut sans danger. On peut en mettre en espalier, pour garnir des parties de mur au couchant. M. de Tschoudi a vu un mur de vingt pieds de haut tout garni de trois pieds d’alaterne n°. 1 ; mais l’usage le plus agréable qu’on puisse en faire, est de les disposer en massif dans les bosquets d’hiver, ayant attention de placer le n°. 1 vers les parties les plus enfoncées, & l’alaterne à feuilles en forme de cœur sur le devant, en les entremêlant de variétés à panache, qui ressortiront mieux à côté d’une verdure simple. Mais pour réussir dans cette opération, il faut choisir ou se procurer artificiellement une partie du bosquet d’hiver, garantie du nord-est, nord & nord-ouest, & s’il se peut de l’est & du sud-est ; car le soleil venant à frapper les feuilles