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nent au règne minéral, & sont connus sous le nom d’acides minéraux. Il paroît que ces sels nitreux sont formés par les plantes mêmes, dans le grand acte de la végétation ; car les plantes qui contiennent des sels différens, naissent souvent les unes à côté des autres. L’expérience suivante en est une preuve assez concluante. Si l’on fait végéter dans la même eau pure distillée une plante aromatique ou astringente d’un côté, & de l’autre le grand tournesol, la pariétaire, ou une borraginée, elles ne changeront point de nature ; les premières donneront du tartre vitriolé, & les secondes du nitre.

§. IV. Des Acides Minéraux.

De tous les acides minéraux, celui que l’on retrouve le plus souvent dans la nature, celui qui est susceptible de plus de combinaisons, celui que l’on a regardé long-tems comme l’unique, dont tous les autres n’étoient que des modifications, est l’acide vitriolique. Outre les caractères communs à tous les acides, qu’il possède éminemment, sa qualité distinctive est d’être sans couleur & sans odeur lorsqu’il est froid ; au feu, il acquiert une légère odeur d’acide marin, & la moindre impureté altère sa transparence. Quoiqu’il change en rouge la couleur bleue des végétaux, il n’en détruit pas la partie colorante ; car on peut ensuite la séparer de l’acide, & elle se trouve dans le même état où elle étoit avant la dissolution. Concentré, sa saveur est violemment aigre & acide ; mais étendu dans une très-grande quantité d’eau, comme plusieurs gouttes dans une pinte, il lui communique un goût aigrelet très-agréable, & forme une espèce de limonade peu dispendieuse & rafraîchissante.

Dans un degré de rapprochement considérable, il a moins de fluidité que l’eau ; une onctuosité apparente le fait filer comme de l’huile, & il paroît gras au toucher. C’est cette propriété qui lui a fait donner fort improprement le nom d’huile de vitriol ; car sa consistance huileuse n’est due qu’au rapprochement de ses parties ; & son onctuosité au toucher vient de ce qu’il dissout une portion de la substance graisseuse de la peau.

Il attire puissamment l’humidité, & s’échauffe avec l’eau ; il est le principe du soufre ; il attaque & dissout presque toutes les substances métalliques, avec lesquelles il forme autant de sels différens qu’on désigne sous le nom générique de vitriol. Ainsi, l’on a le vitriol de lune ou d’argent ; le vitriol de mercure qui, à force de lotions répétées, perd sa couleur blanche, devient plus jaune, & prend alors le nom de turbith minéral ; le vitriol bleu, ou de chypre, ou tout simplement le vitriol de cuivre ; le vitriol de plomb ; le vitriol d’étain ; le vitriol verd de mars, ou de fer, qui, calciné, devient rouge, & prend le nom de colcotar. Une dissolution de vitriol de mars, mêlée avec l’infusion de noix de galle, est, comme tout le monde sait, la base de toutes les recettes pour la composition de l’encre. L’acide vitriolique forme encore, avec l’antimoine, le vitriol antimonial ; avec le bismuth, le vitriol de bismuth ; avec le zinc, le vitriol de zinc, ou la couperose blanche du commerce ;