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des douleurs plus ou moins vives dans la région épigastrique.

L’huile par infusion est employée pour des onctions ; elle ne produit pas des effets sensibles dans les maladies de foiblesse & dans les douleurs rhumatismales. C’est à peu de chose près une préparation inutile.

L’eau distillée n’a pas plus de vertu que l’eau dans laquelle on a fait infuser la plante.

L’huile essentielle, prise intérieurement, échauffe, enflamme & corrode ; en onction, elle augmente quelquefois la sensibilité dans les parties affoiblies par des humeurs séreuses. Cette huile est d’un verd foncé lorsqu’on la tire de la plante fraîche, & d’un jaune brun si on se sert de la plante sèche.

Le sel d’absinthe obtenu par l’incinération de la plante, n’a pas plus de vertu que tous les autres sels des plantes obtenus par cette voie ; c’est-à-dire, c’est un sel alkali fixe. Sa dose est depuis quatre grains jusqu’à demi-drachme dans huit onces d’eau.

On peut donner aux bœufs & aux chevaux le vin d’absinthe, à la dose d’une livre & demie ; le sel d’absinthe à celle de deux drachmes, dans quantité d’eau proportionnée ; & la poudre des semences à la même dose.

Observations curieuses. M. Daniel Major, professeur de botanique de l’université de Kiel, dit avoir vu chez un chimiste de Padoue, un sel lixiviel d’absinthe, qui, par des dissolutions & des filtrations réitérées, avoit acquis la pureté & la transparence du cristal. Ce sel étoit remarquable par sa figure. Peut-être y avoit-il ajouté une petite quantité de nitre. C’étoit un amas d’aiguilles ou petites colonnes quadrangulaires, coniques, traversées par des barres d’un demi-pouce de longueur, surmontées par d’autres plus petites. L’extrémité supérieure de la colonne excédoit un peu cette seconde barre, de telle façon que les cristaux de ce sel ressembloient parfaitement à des croix.

Olaus Borrichius rapporte qu’une dame ayant pris tous les jours, sur la fin de sa grossesse, trente gouttes d’extrait d’absinthe dans un bouillon, pour se fortifier l’estomac, accoucha à terme d’une fille qu’elle voulut nourrir ; mais comme l’enfant tetoit avec répugnance, souffroit des tranchées continuelles, avec un dévoiement opiniâtre, & rendoit toujours des matières vertes, on lui donna une autre nourrice, & tous les symptômes fâcheux disparurent. La mère goûta son lait pour examiner s’il avoit quelque mauvaise qualité ; elle le trouva amer comme du fiel, ainsi que tous ceux qui le goûtèrent.

Pline rapporte que l’absinthe étoit très-amère en Italie ; mais que dans le Pont, où sa moelle étoit douce, le bétail s’engraissoit à force d’en manger, & sa chair ne contractoit aucune amertume. Quoique la petite absinthe soit moins amère que la grande, ce n’est pas en raison de la prétendue douceur de sa moelle que le bétail pouvoit avoir du goût pour l’absinthe : au contraire, il semble rechercher avec avidité l’amertume. Le mouton mange le marron d’Inde, dévore l’olive, même avant sa maturité, & certainement ces deux fruits sont excessivement amers. On lit dans le Voyage de