Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1781, tome 1.djvu/168

Cette page a été validée par deux contributeurs.

derrière : si elles sont pleines de gâteaux, il n’est pas possible d’agrandir le logement des abeilles, sans enlever une partie des provisions qu’il renferme.


Section XI.

De la manière de rendre à la Mère-Ruche l’Essaim qui en est parti, ou d’en réunir plusieurs.


Malgré toutes les précautions qu’on prend, on ne réussit pas toujours à empêcher une ruche de donner son essaim ; dans ce cas, il faut tâcher de le rendre à la mère qui l’a laissé partir. Pour cet effet, le lendemain de la sortie, après que le soleil est couché, on enlève doucement la mère-ruche de dessus son support, & on y place tout de suite celle dans laquelle on a recueilli l’essaim ; on frappe trois ou quatre coups assez fort avec un bâton sur la ruche, & l’essaim tombe sur la table : on y remet tout de suite l’ancienne ruche, dans laquelle l’essaim remonte d’autant plus volontiers, qu’il sort d’une habitation dépourvue de tout, pour entrer dans une autre où règne l’abondance. Le tumulte sera peu considérable pendant la nuit, parce qu’on aura de la peine à se reconnoître ; mais dès que le jour paroîtra, que le soleil échauffera la ruche, les maîtresses du logis verront avec peine, que des étrangères se sont introduites chez elles ; la guerre qui s’allumera, sera terminée par la mort d’une des deux reines, & de quelques abeilles ; la paix succédera à la discorde, & tout l’état sera tranquille.

Si la mère-ruche étoit assez forte, & qu’on voulût profiter des essaims en ne les rendant point à la mère, on ne pourroit pas se dispenser d’en réunir deux, ou même trois ensemble, selon qu’ils seroient forts ou foibles : cette réunion est indispensable pour conserver les essaims qui sont venus trop tard, & qu’on ne veut point rendre à la ruche qui les a donnés ; parce que la récolte étant très-avancée, leur habitation seroit toujours trop vaste, pour qu’ils pussent la garnir suffisamment de provisions ; & le froid qu’ils ressentiroient pendant l’hiver, seroit capable de les faire mourir. On reçoit l’essaim qu’on veut réunir, dans une ruche où il n’y a point de traverses en dedans, auxquelles les abeilles puissent se cramponner ; & afin qu’il n’ait pas le tems de s’y établir, on le réunit à un autre le soir même du jour qu’on l’a reçu. On porte pour cet effet la ruche où est l’essaim qu’on a recueilli dans la journée, auprès de celle où un autre est déjà établi, & auquel on veut le réunir ; on l’enlève de dessus sa table pour y placer tout de suite celle où est l’essaim qu’on veut déloger ; on frappe rudement dessus avec un bâton, & les abeilles qui sont dans le haut tombent sur la table ; on ôte alors cette ruche pour remettre l’ancienne à sa place ; on fait tomber sur la table, avec un balai, les abeilles, qui, malgré les coups qu’on a donnés à leur ruche, y seroient encore restées ; & au moyen du vent qu’on excite avec un soufflet, on les oblige à rejoindre leurs compagnes.

En faisant cette opération la nuit, on ne craint point d’être exposé aux