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la porter dans leurs magasins de réserve : on met la quantité qu’on leur destine, dans un vase plat, sur lequel on met quelques brins de paille, ou de petits morceaux de bois, où les abeilles vont se reposer pour manger : un vase en bois seroit très-bon ; ceux qui sont en terre vernissée, sont froids & trop glissans pour qu’elles puissent remonter aisément, si elles tombent dedans : on soulève la ruche, & on met le vase par-dessous, le matin ou à l’entrée de la nuit : vingt-quatre heures après, on sera fort étonné de ne plus rien trouver dans le vase ; souvent elles mettent plus de tems à emporter les provisions qu’on leur a données ; mais assez communément il ne leur faut que deux jours pour tout enlever.

Une autre manière de nourrir les abeilles, en ne leur donnant à la fois que la quantité de provisions qu’on veut, par la facilité de la renouveler dès qu’on s’apperçoit qu’elle est finie, consiste à mettre dans une bouteille le miel ou le sirop qu’on leur destine : on ferme l’ouverture avec une grosse toile bien tendue, qu’on attache fortement avec une ficelle au col de la bouteille ; on le passe ensuite à un trou qu’on a fait au sommet de la ruche, & les abeilles viennent au goulot pour prendre leurs repas. Comme il est aisé de voir si la bouteille se vuide, on n’y met que la quantité de provisions qu’on desire, & on la renouvelle quand elle est finie. M. Ducarne qui donne cette méthode ingénieuse de nourrir les abeilles, l’avoit apprise de M. Pecquet.

Ces manières d’alimenter les abeilles sont les meilleures de toutes celles qui sont en usage. Bien des auteurs conseillent de mettre simplement une demi-livre de miel environ sur une assiette, qu’on renouvelle à mesure que ces insectes le mangent. Cette méthode très-assujettissante quand on a un grand nombre de ruches, dérange trop souvent les abeilles qui n’aiment pas les fréquentes visites, ni qu’on examine de trop près ce qui se passe dans leur domicile. En leur fournissant tout à la fois la provision qu’on juge leur être nécessaire, on est moins exposé à les troubler ; & on ne craint point de leur porter une nourriture dont elles ne peuvent plus faire usage, comme il arrive quand on la leur donne après qu’elles sont bien affoiblies par une longue disette, parce qu’alors elles n’ont plus le courage de descendre au bas de la ruche pour y prendre leurs repas. Des personnes ont coutume de faire un trou à un des côtés de la ruche, pour y verser quelques cuillerées de miel ou de sirop, qui tombent sur les abeilles, engluent leurs ailes, bouchent leurs stigmates, & les étouffent : d’autres seringuent du miel sur les gâteaux, ou les frottent, de même que les parois intérieures de la ruche, avec une plume trempée dans du miel. Toutes ces opérations nuisibles aux abeilles, supposent qu’elles sont trop foibles pour descendre au bas de la ruche ; & alors il y a peu d’espérance de les sauver, quand on n’a pas eu pour elles les précautions qu’elles exigent à l’entrée de l’hiver.

Quand on donne aux abeilles des fruits cuits, on ne doit jamais les