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coup sans les en défaire. Le plus grand inconvénient de ces poux, c’est qu’ils dénotent une vieille ruche qu’il faut renouveler.

Les crapaux, les grenouilles, les lézards ne font point aux abeilles une guerre déclarée ; ils dévorent, il est vrai, celles qu’ils trouvent à terre, qui sont mortes ou engourdies dans l’herbe. Quoique leurs ravages soient peu considérables, il faut les poursuivre & tâcher de les tuer, afin d’en préserver les ruches.

Les souris, les rats, les mulots sont de tous les ennemis des abeilles ceux qui en détruisent le plus, & qui font les plus grands dégâts à leurs provisions. En hiver, ils sont capables de détruire en très-peu de tems un rucher, si on négligeoit de leur tendre des pièges pour les prendre. Ils s’accommodent de tout dans une ruche ; le miel, la cire sont un mets très-friand pour eux, de même que les abeilles, qu’ils mangent avec grand plaisir, après s’être rassasiés de leurs provisions. Tant qu’elles sont vigoureuses, on ne doit point craindre qu’ils s’exposent à entrer dans une ruche, les coups d’aiguillons les auroient bientôt mis en fuite ; les abeilles, qui les redoutent peu alors, s’en défendent elles-mêmes, & arrêtent leurs incursions : engourdies pendant l’hiver, ils peuvent tout oser & tenter impunément ; elles n’ont pas la force de s’opposer à leurs rapines ; leurs provisions, & elles-mêmes deviennent la proie de ces animaux destructeurs. Tant que les abeilles sont engourdies, il faut continuellement veiller sur les ruches, afin de prévenir les surprises de leurs ennemis, & leur tendre des pièges pour les détruire. Souvent il arrive qu’ils ne sont point les dupes des embûches qu’on leur dresse ; il faut alors recourir au poison, si on peut s’en servir contr’eux sans danger. On peut couper en très-petits morceaux une éponge, & les passer dans la graisse bien salée qu’on a fait fondre lorsqu’elle est encore liquide ; les mettre à leur passage avec de l’eau dans des vases où ils puissent boire aisément, après avoir mangé l’éponge. Cette graisse bien salée, dont ils se sont rassasiés, les excite à boire, & l’eau gonfle l’éponge, qui les fait mourir.

Il n’est point aussi facile de détruire les oiseaux, qui guettent continuellement les abeilles dans leur vol pour les enlever. Les mésanges, les moineaux en détruisent considérablement ; c’est presque la nourriture ordinaire de leurs petits, auxquels ils les portent dans leurs nids. Les gluaux qu’on met au-dessus des ruches en attrapent quelques-uns, & les plus rusés se défient de ce piège, qui souvent prend plus d’abeilles que d’oiseaux. On emploie les trébuchets avec plus de succès ; ils en détruisent quelques-uns sans péril pour les abeilles. Les hirondelles, les martinets, qui ne poursuivent que celles qui se rencontrent à leur passage, en détruisent très-peu : le martin-pêcheur enfonce son long bec dans les ruches de paille, & lorsqu’il est ouvert & que les abeilles sont assez imprudentes pour s’y placer, il le ferme, & les amène à lui pour les avaler : quand on le voit voler autour des ruches, il n’y a pas d’autre moyen, pour s’en défaire, que de lui tirer un coup de fusil.