Cette racine[1] d’Amérique, qui porte le nom de papa, pogny[2], patata et dont l’utilité est reconnue partout, occupe présentement les cultivateurs anglois et françois ; mais personne n’a mieux prouvé l’avantage de la culture de cette racine que M. Parmentier, dans plusieurs mémoires qu’il a donnés à ce sujet. M. de Bomare regarde le Chili comme la patrie des Pommes de terre : elles y croissent effectivement dans toutes les campagnes ; mais celles qui viennent sans culture, ou les sauvages que les Indiens nomment Maglia, font des bulbes très petits, d’un goût un peu amer. On en compte deux espèces différentes, et plus de trente variétés, dont plusieurs sont cultivées avec soin. La première espèce est la commune ; la seconde que l’on pourroit nommer Solanum Cari[3] d’après le nom du pays, porte des fleurs blanches, avec un grand nectaire au milieu, comme les Narcisses ; sa racine est cylindrique, fort douce, et se mange ordinairement cuite sous la cendre. »
Ruiz et Pavon, dans leur Flora peruviana (1798-1802), s’étaient contentés de donner de la Pomme de terre une courte description que nous traduisons ainsi : « Solanum tuberosum. Plante herbacée, haute de trois pieds, bisannuelle. Elle se trouve cultivée dans le Royaume du Pérou et du Chili, et se rencontre sur les collines de Chancay, près des territoires de Jequan et Pasamayo. Elle fleurit en Juillet et Août. On appelle les Pommes de terre, en péruvien Papas, en espagnol Patatas manchegas. La couleur des fleurs et celle des tubercules sont très variables. »
Dans le Voyage en Amérique de Humboldt et Bonpland (1807), Humboldt donne quelques détails sur les stations élevées où se cultive la Pomme de terre et parle de l’ignorance où l’on est encore de son existence à l’état sauvage. « La Pomme de terre, dit-il, cultivée au Chili à 3 600 mètres de hauteur, porte la même fleur que celle que l’on a introduite dans les plaines de la Sibérie… Cette plante bienfaisante sur laquelle se fonde en grande partie la population des pays les plus stériles de l’Europe, pré-
- ↑ — Il ne faut pas prendre à la lettre ce mot de racine, qui a été employé par beaucoup d’anciens auteurs dans le sens de tubercule.
- ↑ — Pogny parait être le nom araucanien des Pommes de terre, que Claude Gay écrivait plus tard Poñis, dont la prononciation est Pognis.
- ↑ — Ce Solanum Cari, vaguement décrit, a intrigué les phytographes. Il ne pouvait avoir rien de commun avec le Solanum tuberosum.