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SON INTRODUCTION EN FRANCE 157

en devoir être provenus, plus gros et en plus grand nombre que des pommes ou morceaux plantés au printems ! Il n’y eut donc qu’un tissu très fort de racines, des jeunes jets sans nombre, et une infinité de fruits qui, de la grosseur d’une noisette, tout au plus d’une noix, commençoient à se former, l’espèce rouge comme la blanche, tout également. A quoi donc la Nature s’est-elle occupée pendant tout ce tems ? Voilà qui mérite d’être approfondi.

» Tems et manière de ramasser les Pommes de terre. Je distingue quant au tems : jamais je ne conseillerois d’en faire la récolte entière, même des plus précoces, dès le mois d’Août, mais seulement autant qu’on a besoin alors pour la nourriture ; l’expérience prouve que toutes les espèces, lors même que les tiges sont sèches, augmentent en quantité et en grosseur jusqu’au commencement du froid. Il y a plus : ceux qui préféreront leur intérêt et profit au désir de s’épargner quelque peine, trouveront bien leur compte, si en cueillant quelques fruits en Juillet et Août pour la nourriture, ils n’arrachent aucune plante, mais la déchaussent, en détachent doucement quelques-uns des plus gros fruits, et recouvrent les autres de terre, ces fruits augmentant, comme nous venons de le dire, indépendamment de cela, vers l’Automne, ce retranchement de quelques-uns contribuera à multiplier et grossir les autres ; de manière que pour le moins, ce qu’on en aura recueilli sera en pur profit.

» Objections. Pourroit-on croire que l’utilité si grande des Pommes de terre, étant aussi généralement connue qu’elle l’est, il se trouvât encore des gens qui se déclarent contre, et surtout soutiennent que leur culture est fort préjudiciable à celle des bleds ?… L’autre objection roule sur la prétendue insanité des Pommes de terre et que « depuis qu’on use de cette nourriture, on voit des maladies plus opiniâtres, plus fréquentes et plus multipliées qu’autrefois ». On dit ce fruit mal sain et indigeste : voici de quoi le laver de cette imputation. Un auteur qui a parcouru l’Irlande et y a fait des observations intéressantes, assure que les habitans, quoique de taille médiocre, sont très robustes, vigoureux, et jouissent d’une parfaite santé ; que plusieurs maladies qui affligent d’autres peuples, leur sont absolument inconnues ; enfin, que les jumeaux y sont assez communs, qu’on en voit sortir par couple de chaque cabane, et que pourtant depuis leur 13° ou 15° année les