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152 HISTOIRE DE LA POMME DE TERRE

je n’ai en vue, en proposant les nouvelles fécules dont je viens de parler (marrons d’Inde, racines d’Iris, etc.), que de mettre tout à profit dans un tems de disette où je suppose qu’on manquerait de grains. J’ai cru ne pouvoir mieux faire que de donner à ces fécules pour récipient les Pommes de terre qu’on trouve maintenant partout et dont la culture ne saurait être trop multipliée. Voici donc comme j’ai procédé. J’ai délayé dans un peu d’eau chaude la doze ordinaire de levain de froment. J’y ai ajouté peu à peu quatre onces de fécule de marrons d’Inde, par exemple, et pareille quantité de Pommes de terre cuites épluchées et réduites en pulpe par une passoire. J’ai laissé cette pâte dans un lieu chaud pendant une heure, je l’ai fait porter ensuite au four pour cuire, et j’ai eu un pain doré, levé, très blanc, de bonne odeur, n’ayant d’autre défaut que d’être un peu fade, défaut que quelques grains de sel corrigeaient bien vite… »

Parmentier ne fit connaître au public ses idées et ses expériences que dans son ouvrage intitulé : Examen chimique de la Pomme de terre, qui parut en 1778.

Cependant la Grande Encyclopédie du XVIIIe siècle ne devait pas s’en tenir à l’article que nous avons reproduit ci-dessus. Nous trouvons, en effet, dans le Supplément paru en 1777, un second et très long article, signé du célèbre agronome Engel, et qui présente un tout autre intérêt. Nous en extrairons les passages suivants.

« La Pomme de terre, dit Engel, est le fruit[1] qui fait la nourriture de plus de la moitié de l’Allemagne, de la Suisse, de la Grande-Bretagne, de l’Irlande, de la Suède et de plusieurs autres pays. Il n’est pas douteux que les Colons François qui en remarquent l’avantage infini que les autres peuples en tirent, ne s’appliquent davantage à cette culture dans la suite, qu’ils n’ont fait par le passé, aussi-tôt qu’ils en seront mieux instruits et que la confusion des noms aura disparu, avec les méprises qu’elle peut causer.

» En certains endroits de France on le nomme patates, et il m’en a coûté quelque chose pour en connaître un autre nom. Au commencement de Janvier 1772, les Pommes de terre que j’avais fait venir d’Irlande étant en route, sous le nom de patates, de Bor-

  1. — Engel emploie souvent à tort le mot fruit pour tubercule.