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philosophe et femme de sciences

sur le chemin des conséquences logiques qui vont tout droit conclure au désordre moral et intellectuel, pour peu que le principe dont elles découlent contienne la plus légère ombre d’erreur.

Si toutes les femmes interrogeaient, comme je l’ai fait, les trente siècles et plus de l’histoire de la philosophie dans son développement ancien et moderne, elles perdraient une grande partie du respect que beaucoup d’entre elles accordent d’une façon si absolue et vouent sur la parole de la renommée aux noms des hommes que d’autres hommes ont salués du titre de grand. Elles verraient que si de vrais génies ont apparu parfois, apportant au monde une découverte utile, une loi juste et bienfaisante, aussi par contre, tous les systèmes les plus impossibles, les plus contradictoires avec la réalité des faits, sont sortis du plus profond des plis des robes des docteurs ; que, sous prétexte de sagesse, toujours, les utopies, les rêveries les plus étrangers, les plus irréalisables se sont élancées de leur cerveau en délire, comme autant de Pallas surgissant l’égide au bras, de la tête d’autres Jupiters.

Vous n’êtes pas, mesdames, sans avoir entendu prononcer ou lu en quelque endroit les noms si fameux en Allemagne de Kant, de Fichte, de Schelling, de Hegel ; leurs doctrines sont devenues populaires outre-Rhin, elles tendent à se répandre en France, en Angleterre ; vous serez étonnées lorsque j’aurai l’occasion de vous en dire quelques mots, que des gommes de sens rassis et profond aient pu produire de pareilles énormités intellectuelles et les professer sérieusement comme la doctrine suprême de la vérité des choses. Tous, plus ou moins, ils aboutissent aux négations de la critique ou aux affirmations aussi négatives du panthéisme. Entre eux tous, je ne saurais réellement faire un choix, et ce sont là cependant les géants de la philosophie.

Il semble, d’après cela, qu’il ne faille qu’arriver à une solution étrange, révoltante pour la saine raison pour être salué par ses contemporains ou par la postérité du titre de génie, de révélateur, de prophète. Ainsi l’Allemagne, à côté de ces fameux chefs d’école, en a produit quelques autres non moins remarquables. Pourquoi sont-ils restés moins célèbres ? C’est peut-être seulement parce qu’ils ont repoussé, combattu toujours les étrangetés de ces novateurs de l’esprit qui, ne pouvant expliquer le système des choses, en inventent un autre à leur fantaisie et écrivent dessous : voici la loi de l’être. Parmi ces écrivains