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LES ANCIENS CANADIENS

continue, au manoir des d’Haberville, entre ses parents devenus vieux, l’oncle Raoul et Blanche, les traditions hospitalières de sa famille. Et plus tard, quand bien des années auront passé sur les amours de Blanche et d’Arché, et les auront transformées en une pure amitié fraternelle, Arché viendra lui aussi reprendre sa place au foyer des bienfaiteurs de sa jeunesse.

Tel est le plan ou le dessin très simple, peu compliqué de la trame du livre de M. de Gaspé. Et c’est à propos d’un pareil livre qu’on a pu se demander s’il était vraiment un roman, s’il n’était pas plutôt une série de tableaux historiques, ou bien encore s’il ne constituait pas pour nous, Canadiens, une première ébauche, l’esquisse d’une épopée nationale. Pourquoi les Anciens Canadiens ne seraient-ils pas tout cela, et tout à la fois ? Le roman ne peut-il pas être une véritable épopée, et l’épopée n’est-elle pas à son tour de l’histoire ?

Aussi bien, d’ailleurs, y a-t-il dans l’œuvre de Gaspé tous les éléments, sauf les vers, tous les matériaux qui entrent dans la construction d’une épopée. C’est une chanson de geste en prose qu’a écrite l’auteur des Anciens Canadiens ; et il y a enfermé et mêlé l’histoire et la légende ; il y a raconté des actions héroïques et les drames non moins poignants de la conscience ; il y a introduit le merveilleux sans lequel il semble que ne peuvent exister les œuvres épiques ; il y a fait apparaître un amour, trop discret peut-être pour que le roman s’en puisse contenter, mais qui ne laisse pas de rappeler ces sourires mêlés de larmes qui traversent l’Iliade, ou cette passion vive et contenue, qui n’éclate que pour mourir à la fin de la Chanson de Roland. Et si vous ajoutez à tout cela la couleur solide et fraîche des paysages, le style tout émaillé et garni des expressions de nos bonnes gens, très simple,