crainte qu’on ne l’accusât de sotte vanité, au compte du héros principal de son livre.
Aussi bien, le caractère[1] de Jean Rivard est-il le plus riche, le plus attachant qu’il y ait dans ce roman. L’auteur concentre sur l’étude de ce caractère ses facultés d’observation ; il ne s’attarde pas à décrire ce jeune homme de dix-neuf ans ; il ne veut pas qu’on fixe longtemps ses yeux sur ce qui ne saurait être que le portrait physique du personnage. Il ne dit de ses qualités extérieures que juste ce qu’il faut pour qu’on y voie passer le rayonnement d’une grande âme.
« C’était un beau jeune homme brun, de taille moyenne. Sa figure pâle et ferme, son épaisse chevelure, ses larges et fortes épaules, mais surtout des yeux noirs, étincelants, dans lesquels se lisait une indomptable force de volonté, tout cela, joint à une âme ardente, à un cœur chaud et à beaucoup d’intelligence, faisait de Jean Rivard un caractère remarquable et véritablement attachant. » Et, pour satisfaire sans doute les lecteurs du roman qui s’imaginent que le héros principal ne peut être intéressant s’il ne joint à ses vertus les dons de l’élégance mondaine et frivole, Gérin-Lajoie ajoute : « Trois mois passés au sein d’une grande cité, entre les mains d’un tailleur à la mode, d’un coiffeur, d’un bottier, d’un maître de danse, et un peu de fréquentation de ce qu’on est convenu d’appeler le grand monde, en eussent fait un élé-
- ↑ Les pages qui suivent ont été publiées d’abord comme une étude d’ensemble des caractères dans Jean Rivard, et indépendante de ce qui précède. C’est ce qui y explique certains retours vers des faits, d’ailleurs présentés autrement, que l’on a pu voir signalés dans l’analyse même du roman.