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ROMANCIERS DE CHEZ NOUS

regrette d’avoir dit tout le mal qu’il pense des députés qu’il coudoie et qu’il mesure, est-ce plutôt pour le remords d’avoir trop décrié ceux-là que nous envoyons au Parlement pour qu’ils travaillent et qu’ils fassent de bonnes lois, mais que lui, romancier, nous avait représentés comme oubliant souvent ce pourquoi ils sont députés et plénipotentiaires du peuple ? — Gérin-Lajoie a supprimé dans l’édition définitive tout ce qu’il nous avait d’abord appris sur la carrière de Jean Rivard député. Ces pages ne sont guère, au surplus, qu’une critique assez vive de l’esprit de parti, de notre système et de nos habitudes parlementaires, et l’on n’y voyait pas assez l’effort qu’aurait dû faire Jean Rivard lui-même pour améliorer le mécanisme et le fonctionnement de cette machine politique.

Le député de Bristol, qui s’était présenté devant ses électeurs comme candidat indépendant de tous les partis, excellait à montrer les faiblesses de ses collaborateurs au Parlement ; il eût été un intrépide démolisseur, mais il ne paraît pas qu’il eût été capable de rien construire. Aussi bien, Jean Rivard comprit-il que le rôle de député passait ses forces, était incompatible avec son humeur et avec ses goûts ; il se prit à regretter la forêt, et, député presque inutile, il eut le seul et déjà fort appréciable mérite de ne pas vouloir retourner au Parlement.

Gérin-Lajoie a donc fait disparaître, à tort croyons-nous, si l’on se place au point de vue de la conduite de l’œuvre et de l’équilibre du plan et de la composition, ce tableau de la vie parlementaire, pessimiste sans doute, mais où l’on trouve des pages fort instructives, et de la plus fine ironie. Jean Rivard, que ses ennemis politiques accusaient de n’être qu’une machine à voter, rentre dans son foyer et dans sa paroisse pour n’en plus sortir. Il y rentre, à la vérité, un peu diminué, et c’est la faute de Gérin-Lajoie ; et c’est pour cela que l’auteur a décidé de ne plus publier ce que Jean Rivard a fait, ou plutôt de ne plus montrer ce qu’il n’a pas fait et qu’il aurait dû faire pendant son séjour à Québec ; et c’est pour cela