grets, et ces jeux d’ombre et de lumière que l’on aperçoit dans son portrait, et c’est cela aussi qui apparaît à travers les pages si variées qu’il a écrites : tour à tour pleines de gaieté abondante et copieuse, parfumées de christianisme bienfaisant, frémissantes d’enthousiasme et de passions, et parfois aussi humides et baignées de larmes.
Faut-il ajouter que les qualités littéraires et les défauts de l’artiste qui a conçu l’œuvre et l’a exécutée, pourraient encore révéler à leur tour son esprit et son tempérament ?
Sans doute, il est assez difficile d’apprécier et de cataloguer un écrivain qui déclare, en manière de préface, qu’il n’a pas l’intention de composer un ouvrage secundum artem, qu’il n’écrit que pour s’amuser, qu’il entend bien avoir ses coudées franches, ne s’assujettir à aucune des règles qu’il connaît, et qui conseille simplement au lecteur de laisser là son livre s’il l’ennuie.[1] Cependant, il est possible de reconnaître, sous ce désordre apparent, le talent de l’écrivain. Et, par exemple, il ne sera pas malaisé de remarquer qu’il y a à la fois de la bonhomie et de l’étude dans ce livre, et que la simplicité y cotoie la rhétorique.
Que M. de Gaspé ait librement laissé trotter sa plume sur la rame de papier-bonnet qu’il acheta un bon matin chez son libraire, cela est incontestable, et se peut déduire de la façon même dont l’œuvre est conduite. Il y a dans ces pages une sorte de facilité, d’abondance et de verbosité qui suppose chez l’écrivain l’abandon confiant et sincère de sa pensée à la bienveillance du lecteur. Et cette générosité et cette prodigalité de paroles, qui
- ↑ Cf. pages 5-8, passim.