C’est pour contribuer lui-même à cette œuvre de réhabilitation qu’il raconte quelques-unes des dernières scènes du drame qui se dénoue aux portes de Québec, sur les plaines d’Abraham.
Et d’abord, l’incendie de nos campagnes, dont avec une habileté d’artiste et de romancier, il fait coupable Arché lui-même. Quand on lit ces pages où flamboie « l’incendie de la côte sud », on ne sait si la désolation des habitants, et les ruines fumantes de tant de maisons réduites en cendre sont un spectacle plus triste et plus lamentable que le drame tout psychologique qui occupe et torture la conscience du lieutenant de Montgomery. Ce fut vraiment le triomphe de l’écrivain de faire, malgré tout, si sympathique aux lecteurs canadiens, le destructeur même de leurs propres foyers.
Puis, comme pour opposer à ce tableau où s’étalent d’inutiles et sombres vengeances, qu’éclairent les plus sinistres reflets, la hardiesse loyale et franche de nos soldats, la lumière pure des grands dévouements, M. de Gaspé nous fait assister aux dernières escarmouches qui terminèrent notre consolante et dernière victoire de 1760. Il met en présence les deux jeunes guerriers qui doivent retenir l’attention du lecteur. Il procède un peu à la façon d’Homère, qui ne s’attachait nullement à décrire les mouvements d’ensemble des batailles où Troyens et Grecs luttaient corps à corps, et se précipitaient les uns contre les autres, mais qui aimait mieux décrire ces combats singuliers où deux guerriers, Agamemnon et Oïlée, Achille et Hector, mesurent leur valeur. L’auteur des Anciens Canadiens n’entreprend pas le récit de cette grande mêlée héroïque où les Canadiens, conduits par Lévis, et victorieux pendant la journée du 28 avril, prouvèrent une fois encore qu’ils étaient plus grands que leurs malheurs. Il concentre plutôt l’attention du lecteur sur les deux héros de son drame, et s’il met en bonne lumière, autour du moulin de Dumont, la prudence réfléchie d’Arché, il exalte avec une visible prédilec-