rêt essentiel s’amorce trop lentement, et l’on voudrait que l’auteur eût commencé son livre par le chapitre quatrième, — in medias res — par la scène violente qui brise Philippe, qui pose la thèse du roman et qui définit l’âme de James Robertson. D’autre part, le roman a le grave défaut de ne pas finir, de laisser le lecteur dans l’incertitude, de ne pas l’avertir assez de ce qui arrivera du projet de transplanter Robert dans l’Ontario.
C’est une des méthodes contestables de M. Bernard de procéder par des approches trop détournées, parfois décevantes — deux fois il est question de façon inintelligible de la fameuse scène de Philippe, avant que l’on sache de quoi il s’agit — et de placer l’intérêt du roman dans des secrets, des mystifications, des cachotteries d’intrigues où il ne peut être.
Qu’on relise à ce point de vue la première visite de James Robertson à Miss Parker, ou bien son prétendu voyage à Sherbrooke, et même la bizarre embuscade au verger des Riendeau.
Mais si Harry Bernard ne sait pas assez ramasser les éléments du drame, ni assez les coordonner, il dessine avec une suffisante fermeté la ligne des caractères, la silhouette de ses personnages. Non pas qu’il s’applique à composer des portraits psychologiques où se condense l’âme des héros ; il laisse plutôt ou plus volontiers les paroles, les démarches, les événements révéler les personnages et les faire paraître fidèles à eux-mêmes. Ainsi fait-il pour James Robertson, l’anglais bourru et irrité par la vie ; et c’est de cette même façon que peu à peu se détache en relief le caractère de Georges, jeune homme qui n’a rien des passions patriotiques de son père, sage et complaisant, d’éducation toute canadienne-française, et qui ne songe qu’à épouser un jour Madeleine Riendeau.
Celle-ci, d’ailleurs, est le personnage faible du roman. Ses désolations, à la pensée que son mariage pourrait être contrecarré par le vieux Robertson, sont pour le moins exagérées. On n’est pas habitué à voir une robuste