Jacqueline, replacée tout à coup au niveau peut-être chimérique de l’âme d’André, consent à son départ. « Nous nous rejoindrons plus tard. » — Et le premier vaisseau d’avril emporte vers Paris André Laurence, Canadien français.
La fable de ce roman est vraisemblable. Il se peut que de telles âmes jeunes, enthousiastes, s’éprennent d’un rêve ou d’une chimère, l’épousent pour ensuite s’épouser elles-mêmes. Quelle sera la fin de l’aventure d’André et de Jacqueline ? Nous le saurons, car M. Pierre Dupuy prépare une suite de son premier roman, et il annonce la Découverte de Paris, qui sera sans doute suivie elle-même du retour au Canada.
Mais sans nous inquiéter davantage de ces deux jeunes fous sympathiques qui s’enfoncent en plein rêve, constatons que M. Dupuy a écrit un roman qui, sans surpasser les meilleurs ou les moins imparfaits de chez nous, se classe à peu près à leur niveau.
L’action, que la vie réelle a peut-être largement suggérée, s’en va rapide, assez peu compliquée, chargée de suffisante matière, et se déroule en chapitres précis et clairs. Elle n’est pas toujours suffisamment approfondie ; elle court trop souvent à la surface des âmes ; elle manque d’une plus substantielle psychologie ; elle ne donne pas assez cette impression de plénitude qui est la marque du roman fort, supérieur. Mais il y a dans André Laurence assez de choses canadiennes et assez de vues personnelles à M. Dupuy ou communes à beaucoup, pour qu’il soit un exemplaire intéressant de l’art et de la vie de chez nous.
André Laurence représente un nouvel état d’âme chez nos jeunes, chez quelques-uns de nos jeunes ; reconnaissons que s’il y a de l’aventure, beaucoup d’aventures dans une vocation comme la sienne, de telles vocations ont ailleurs fini par la bohème ou la gloire. Et c’est peut-être l’une et l’autre qui sollicitent quelques-unes de nos têtes de vingt ans. Ces têtes, qui se dressent dans le rêve