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LA PÉPITE D’OR

source, nous pourrons l’apporter dans cette seconde grotte que nous venons de découvrir.

— Une idée ! exclama Pierre. J’y songe tout à coup. Sais-tu ? notre grande caverne, c’est le fourneau de la Pipe, et…

— Et nous venons d’en parcourir le tuyau, interrompit Joseph.

— C’est ça !

— Eh bien ! c’est toujours bon à savoir !

Le lendemain matin, armés de leurs pics et de leurs pelles, les quatre hommes attaquèrent le sol avec ardeur, à mi-chemin entre la source et la grotte. À un pied de profondeur, Pierre, au bout de son pic, rencontra un corps dur.

Ému, tremblant à la pensée que ce pouvait être l’énorme pépite enfouie par l’auteur des petites cartes, il s’arrêta, mais le son rendu au contact de l’outil et de la substance inconnue n’était pas celui de l’acier frappant sur le métal.

Maîtrisant son émotion, il continua son travail et mit bientôt à jour une masse informe et noirâtre. Il promena la pointe de son pic dessus. C’était mou comme la laine. C’était un morceau d’étoffe brune qui se déchira, pourri par l’humidité du sol.

En ce moment, un rayon de soleil, glissant jusque dans le trou fait par Pierre, éclaira cette masse sombre, et, frappant sur la déchirure de l’étoffe, produisit un éclair fauve.

Plus de doute : il avait sous les yeux la pépite de la victime de l’Œil-Croche.

Mais elle pesait beaucoup, et il dut employer ses deux mains et faire appel à un bon coup de jarret et de reins pour la jeter hors de son lit.

— Eurêka ! cria-t-il gaiement.

Joseph, qui travaillait un peu plus loin, accourut.

La dépouillant de son enveloppe pourrie, ils la contemplèrent avec une joie suffocante, délirante.

Quel joli caillou ! murmurait de Noyelles.

Mentalement Joseph supputait le nombre de pièces d’or que cette masse leur rapporterait.

Apparemment que ce calcul lui plut, car il eut un sourire satisfait.

Puis, ils transportèrent l’or dans la caverne, et prenant le couloir ou le tuyau de la Pipe, comme disait Joseph, il le portèrent à la deuxième grotte.

Encouragés par cette riche trouvaille ils retournèrent aux Jumelles, mais après y avoir travaillé deux autres journées sans succès, ils se décidèrent à abandonner leurs recherches pour le présent et à retourner au fort.

Ayant pris un court repos, ils partirent aux premières heures du jour, en masquant soigneusement l’ouverture de la caverne.

Ils retournaient d’une allure moins rapide qu’ils n’étaient venus.

On aurait dit qu’ils quittaient à regret leur trésor, quoiqu’ils dussent revenir bientôt.

Si les deux Canadiens eussent possédé un chronomètre, ils au-