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UNE SURPRISE

D’abord, au commencement de son témoignage, M. de la Vérendrye avait passé sous silence le secret du Bison ; venait ensuite la lettre mystérieuse, et tout se déclarait, hors l’existence du secret.

M. de la Vérendrye avait donc intérêt à se taire.

Et une mine d’or !… d’une richesse fabuleuse !… comme le disait le billet.

— Bigre ! pensait le magistrat, si je pouvais mettre la main sur ce secret !… mais, à présent, il n’y a rien à faire !… je vais les congédier, et puis, je les ferai espionner ! Plus tard, nous verrons.

— Messieurs ! reprit-il à haute voix, je vous remercie beaucoup des renseignements que vous avez donnés à la justice. Je vais m’occuper avec zèle de cette affaire — il était sincère — et je ne désespère pas de découvrir le coupable.

Voyant que le juge n’avait plus besoin d’eux, les jeunes gens prirent congé de lui. Mais Joseph, se ravisant soudain, se tourna vers le magistrat.

M. Varin, dit-il, je pense que si vous pouviez mettre la main sur l’auteur de l’écrit anonyme, vous auriez trouvé l’assassin de l’ancien chef des Mandanes.

Frappé par ces mots, le juge murmura ;

— En effet !… cela se pourrait… je vais y réfléchir !…

C’est Lanouiller, qui n’était pas de bonne humeur.

— Diable ! se disait-il, nous ne sommes guère plus avancés ! Brossard a fait de la besogne inutile et qui lui attirera peut-être plus d’ennui que de bien !… Mais, tout de même, son idée était ingénieuse pour forcer le secret des deux gentilshommes.

— Lanouiller !

— Monsieur le juge. ?

— Crois-tu qu’il n’y avait rien dans l’amulette de l’aigle noir ?

— Je crois tout le contraire.

— Mais alors ?

— On a dépouillé l’amulette de son contenu, que l’on cache avec soin.

— Une mine d’or !… d’une richesse fabuleuse !… murmura le juge. Je pourrais retourner en France et vivre en grand seigneur le reste de mes jours !… Haussant la voix, il dit : Je serais curieux de savoir ce qu’il y a de vrai dans toute cette histoire.

C’était énoncé avec intention, on le comprend.

— Il y aurait peut-être moyen de satisfaire le désir de monsieur, dit Lanouiller.

— Dis-tu vrai ?… Tu sais, c’est simplement par curiosité, et je ne veux être mêlé à rien…

— Ne craignez pas, je vais essayer de vous faire ce petit plaisir, sans nuire à personne.

— Bon ! tu es un brave garçon, Lanouiller !

Le juge était une créature de Bigot, cet être aux sentiments les plus vils, qui semble avoir inculqué tous ses vices à ses subordonnés, dès son arrivée au Canada. Il ne faut donc pas s’étonner outre mesure si nous voyons cet homme si avide de gain.