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Les domaines collectifs et la petite propriété. — Il est à remarquer qu’en Italie les pouvoirs publics organisent les domaines collectifs, déjà existant en fait d’ailleurs, à l’époque où, dans d’autres pays, disparaissent les derniers restes de la propriété communautaire. En Hollande et en Allemagne, la mark a commencé à être partagée dès les premières années du xixe siècle, et actuellement c’est à peine si on en peut signaler çà et là quelques lambeaux : la propriété privée paysanne s’est développée à ses dépens avec l’approbation de tous et pour le grand profit de la collectivité puisque des territoires autrefois incultes sont aujourd’hui en plein rapport. Évidemment, l’idéal poursuivi n’est pas le même. Remarquons d’ailleurs que, dans la plaine saxonne, les droits d’usage de la mark étaient attachés à la possession d’un domaine, tandis qu’en Italie les usi civici sont des droits attachés à la résidence. Comment en serait-il autrement ? Le paysan de la province de Rome n’est généralement pas propriétaire ; il ne possède souvent même pas sa maison, tandis que le paysan saxon confond sa famille avec son foyer et son domaine[1] Plus le domaine sera productif et riche, plus nombreuse et plus prospère pourra être la famille, plus forte et meilleure pourra être l’éducation donnée aux enfants, plus efficace l’as-

  1. On objectera peut-être que, sous le régime féodal, le paysan saxon n’avait pas la pleine propriété de son domaine. C’est vrai, mais il avait sur sa tenure des droits réels dont il ne pouvait pas être privé arbitrairement. À défaut de la pleine propriété juridique il avait le domaine utile, et au point de vue social, c’est l’essentiel. Le paysan romain, au contraire, n’est pas fixé au sol, il est seulement attaché au groupe.