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cédant à la force et reconnaissant ce qu’il ne peut empêcher. Cela est peut-être pacifique, mais ressemble terriblement à l’anarchie : abdication du patron qui ne dirige plus l’exploitation du sol ; abdication des pouvoirs publics qui, par les tribunaux, doivent dire le droit, et, par la force armée, doivent le faire respecter. Il est vrai qu’à l’heure actuelle on ne sait guère où est le droit et, en dépit des principes d'imprescriptibilité ou d’inaliénabilité, il est en train de se constituer par la force.

On loue le ministère actuel de faire intervenir moins fréquemment les soldats en faveur des propriétaires. Cette modération qui est due à l’indécision où on se trouve le plus souvent à l’égard du droit, a pour résultat de diminuer le nombre des conflits sanglants, mais cependant les rixes et les meurtres ayant pour cause les usages publics ne sont pas rares.

À Altigliano, par exemple, une lutte sauvage s’engage entre un fermier et des paysans qui veulent faire du bois ; il y a deux blessés et deux morts : le président et le secrétaire de la Ligue des paysans restent sur le carreau, le fermier a une main coupée et le crâne fendu.

« Depuis quatre ans, Attigliano, précédant tous les autres pays de la région, a commencé la lutte pour ses revendications ; l’ignorance du législateur, la faiblesse de l’autorité ont permis à cette lutte de se prolonger en devenant chaque jour plus acharnée, et de se répandre comme une épidémie dans tous les pays voisins… Cette agitation, sacrosainte dans son origine, aboutit maintenant à l’anarchie, semant partout la haine.