Page:Routhier - Les échos, 1882.djvu/177

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

189
stella maris

Sur le plus haut sommet de la falaise altière,
Immobile et muette à l’ombre des grands pins,
Les bras levés au ciel, une madone en pierre,
L’œil perdu sur les flots, priait pour les marins.
Jeanne la salua. La petite Marie,
Que sa mère au printemps avait vouée au bleu,
Dit en joignant les mains : « ô Patronne chérie !
Etoile de la mer, pour nous tous priez Dieu. »


III


La mer ! c’est un berceau, quand elle est endormie
Et fait en ondulant le hamac le plus doux ;
Mais gare à son réveil, car c’est une ennemie
Qui contre le navire entre alors en courroux.
On dirait que soudain une haine terrible,
Messagère de mort — s’allume dans son sein ;
Elle crie, elle écume, et sur sa face horrible
Se trahit contre l’homme un sinistre dessein.
Elle ouvre en mugissant ses entrailles puissantes,
Elle y creuse soudain des abîmes sans fond ;
Et, dressant des milliers de têtes menaçantes,
Elle jette un défi d’audace au ciel profond.

La mer, c’est l’inconnu, c’est le désert sans bornes,
C’est l’abîme insondable, immense, plein de bruit ;