Avaient ensorcelé ce cœur naïf encore ;
Sous leurs regards de flamme, Albert avait un jour
Senti grandir en lui ce brasier qui dévore,
Pâle reflet pourtant de l’éternel amour !
L’amour ! c’était pour lui la suprême espérance,
Et le dernier besoin de son cœur courageux ;
Le seul astre qui pût dissiper sa souffrance
Et scintiller encor dans son ciel orageux !
Hélas ! ainsi qu’un spectre entrevu dans un songe,
Son dernier rêve d’or s’était évanoui :
L’amour n’avait été qu’un funeste mensonge,
Et ces êtres charmants qui l’avaient ébloui,
Tour à tour, sous ses yeux, étaient rentrés dans l’ombre.
L’une l’avait trahi pour l’amour d’un blason !
L’autre, du fond du ciel, — comme un astre qui sombre,
Avait soudainement glissé sous l’horizon :
Au fond d’un monastère allant cacher sa vie,
Elle avait emporté son unique trésor,
Le seul bien qui restât à son âme ravie,
De son dernier soleil, le dernier rayon d’or !
Et maintenant rêveur, l’âme tout éplorée,
Il venait contempler une dernière fois
Ce salon, que naguère une bouche adorée
Enchantait si souvent des échos de sa voix.
C’était, se disait-on, la dernière soirée,
Et le dernier banquet où le portaient ses pas.
Mais qu’allait-il donc faire ? On ne le savait pas.
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échos patriotiques