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LE CENTURION

soupçonner quelque velléité d’affranchir son pays du joug étranger.

Un jour même, dans la Pérée, une grande foule avait voulu le proclamer roi. Mais il s’était dérobé à la dignité que le suffrage populaire voulait lui imposer, et il s’était enfui comme devant un outrage.

Un autre jour, les pharisiens lui avaient tendu un piège à ce sujet, et tenté de le compromettre vis-à-vis l’autorité romaine. Mais Jésus avait fait cette réponse d’une sagesse profonde, et qui résumait toute sa doctrine politico-religieuse : Rendez à César ce qui appartient à César, et à Dieu ce qui appartient à Dieu.

Il est vrai encore que, quelques jours auparavant, Jésus était rentré à Jérusalem comme un triomphateur au milieu des acclamations de la multitude. Mais dans cette multitude il n’y avait ni séditieux, ni ambitieux, ni personnages influents. C’étaient les humbles, les pauvres, les déshérités, les impuissants. C’étaient les cœurs simples que les affaires d’État ne préoccupent guère, et qui ne rêvaient pas de renverser les pouvoirs établis.

Pilatus devait savoir tout cela, et il en avait assez appris sur le compte de Jésus pour être convaincu que cet homme ne pouvait pas être un danger pour la puissance romaine.

Sans doute, il comprenait, ou tout au moins soupçonnait qu’il y avait en Jésus un réformateur