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LE CENTURION

— Voyez donc cette vigne plantureuse, dit Pierre à son maître silencieux, le sol n’est pourtant pas riche sur cette montagne aride.

Le regard de Jésus était levé vers la lune dont l’éclat illuminait sa face auguste ; il l’abaissa vers Pierre et dit :

— « Je suis la vraie Vigne, et vous êtes les sarments ; mon Père est le vigneron. Tout sarment qui ne porte pas fruit, il le retranche… Demeurez en moi et moi en vous. Comme le sarment ne peut porter de fruit s’il ne demeure uni à la vigne, vous n’en porterez pas non plus si vous ne demeurez en moi…

Longtemps Jésus causa avec ces amis vraiment sincères. Plusieurs fois il leur commanda de s’aimer les uns les autres. Il leur prédit qu’ils seraient persécutés et haïs, comme il l’avait été lui-même… « Vous pleurerez, mais votre affliction se changera en joie… » Il leur annonça l’Esprit consolateur. Il leur prêcha la fermeté dans la foi et la prière ; et s’adressant lui-même à son Père il pria pour eux, et pour ceux qui dans la suite des siècles croiraient en lui…

La tristesse et le découragement gagnaient de plus en plus les disciples ; car ils ne comprenaient pas comment ni pourquoi leur maître, si jeune, si puissant, si extraordinaire, pour lequel ils avaient tout quitté, et qui les avait tant aimés, allait maintenant les abandonner, les laisser seuls sur la terre, sans avoir établi son royaume…