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Elle a besoin, comme nous, d’une nourriture céleste, et elle la recherche avec plus de zèle que nous.

Mais, remarquez-le bien, le sol qui lui a donné la vie, continue de lui donner en nourriture son corps et sa substance. Symbole très frappant de l’Eucharistie !

Toute la nature vivante pourrait nous offrir des leçons du même genre, si nous avions le temps d’en étudier les phénomènes. Mais c’est la vie de l’homme qui doit absorber toute notre attention.


II


Comme la plante et comme la plupart des animaux sans raison, il est d’abord contenu dans un germe, au sein mystérieux de la nature. Il y prend vie, il s’y développe, et dans une réelle communion, il s’y nourrit de la substance même de l’être qui lui a donné la vie. Nouveau symbole du miracle eucharistique.

Puis il paraît au jour, et pendant quelque temps encore il se nourrit de la chair de celle qui l’a enfanté. C’est le corps seulement qui se développe dans la beauté de sa forme et dans l’harmonie de ses proportions.

Mais voici qu’une vie nouvelle apparaît en lui, qui le distingue de la plante et de l’animal sans raison, et qui l’élève bien au-dessus d’eux.

C’est le phénomène le plus admirable de la croissance humaine. Car alors l’être humain, dont le Créateur est trinité, manifeste en lui-même trois vies distinctes et différentes : la vie du corps, la vie intellectuelle ou de l’esprit, et la vie surnaturelle de l’âme.

C’est la gradation ascensionnelle de la vie dans l’échelle des êtres créés, et qui place l’homme au sommet, au-dessus de tous les autres.

Or, ces trois vies ne subsistent pas toutes seules ; il faut les nourrir toutes les trois, avec des aliments appropriés à leur nature. Et ne me dites pas que la vie surnaturelle et la vie intellectuelle sont une seule et même vie. Non, elles sont deux vies différentes de l’âme, aussi différentes l’une de l’autre que la vie du corps diffère de celle de l’esprit. Cela est facile à démontrer. Voyez ce pauvre malade qui, au point de vue de la vie corporelle, n’est plus qu’un cadavre. Il va mourir dans une heure, ont déclaré les hommes de l’art. Et cependant son intelligence est aussi vivace, aussi brillante que jamais. Il parle, et ses paroles sont des oracles et des éclairs de génie.

Sans doute, cette vie intellectuelle qui brille de tant d’éclat, va finir avec la vie du corps ; mais cela ne prouve que leur union intime. Elles n’en sont pas moins distinctes et différentes par nature. Et de même que la vie intellectuelle peut subsister dans toute sa vigueur, alors que la vie corporelle va s’éteindre, de même la vie intellectuelle peut être complètement éteinte dans un individu qui jouit d’une santé corporelle parfaite. Allez dans un asile d’aliénés, et vous en verrez de nombreux spécimens.