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LES VOIX DE LA NATURE

La rivière se creuse et s’élargit à la fois. Une brume légère s’élève paresseusement de l’eau et accroche ses flocons de neige aux flancs des rochers, ou à mi-hauteur des grands arbres. On dirait des falbalas de dentelle blanche sur des robes foncées.

Comme nous-mêmes, la nature paraît encore assoupie dans les langueurs du matin. Elle attend son bien-aimé, le soleil, que la lumière précède comme un avant-coureur, mais qui n’a pas encore montré sa face rayonnante dans le fond des ravins où les eaux du grand lac se précipitent.

À demi voilés par les vapeurs de l’aurore, les sapins et les épinettes dressent leurs cônes immobiles au bord des falaises tantôt abruptes, tantôt en pente douce ; et dans quelques endroits plus bas, des cèdres courbés se penchent sur les ondes noires.