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l’égalité n’existe nulle part. Il y a sans doute à côté d’eux de pauvres petits qui se plaignent d’avoir trop d’ombre, et qui réclament leur part d’air et de soleil. Il en est d’autres qui reprochent aux cèdres orgueilleux d’accaparer le sol avec leurs puissantes racines, et d’en épuiser les sucs.

Mais les cèdres répondent peut-être : « Allons, petits, prenez patience, vous aurez un jour notre taille et nos avantages ; il y a longtemps que nous travaillons, nous, à distiller les sucs de la terre, et les pluies du ciel, et les gaz de l’air ; il y a longtemps que nous luttons contre les tempêtes et les intempéries des saisons. Nous l’avons bien gagnée cette puissante stature que vous nous enviez. Car il vous faut de l’ombre pour grandir, et nous vous la donnons, en en même temps que nous vous défendons contre les assauts du vent et de l’orage. Vivons donc en paix, petits, et prêtons-nous assistance mutuelle. »

Si le fleuve entend ce colloque des arbres il doit y mettre son mot. Car il a bien droit à leur reconnaissance, lui qui baigne leurs racines.

Sur la rive où nous sommes s’élèvent tout d’abord la gare, puis le premier plateau de la colline où sont dressées les tentes des sauvages, et enfin le sommet, où sont bâtis le couvent, l’église, et la maison des Pères, et qui domine tout le panorama.

Des chemins en lacets, partant du camp sauvage,